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Ainsi se vérifiait le mot d’Auguste qui se vantait, ayant trouvé une ville de briques, de laisser une ville de marbre.

Les Romains continuèrent à guerroyer et à conquérir et conquise par César au milieu du premier siècle av. J.-C., la Gaule resta romaine jusqu’aux grandes invasions du ve siècle pendant la domination romaine.

L’art Gallo-Romain fut très fécond, mais sans originalité et Jules Bouniol écrit que les villes s’embellirent de superbes monuments exécutés par des artistes grecs ou italiens. Les Arvernes commandèrent au grec Zénodore une statue colossale de Mercure qui exigea dix ans de travail et coûta quarante millions de sesterces (un million de francs). Les œuvres d’architecture célèbres trouvées en Gaule : les Vénus de Vienne, d’Arles, de Fréjus, le Faune d’Arles, l’Athlète de Vaison, le Guerrier d’Autun, la mosaïque de Lillebonne sont des copies d’œuvres grecques. Les monuments qui faisaient l’orgueil des villes gallo-romaines n’avaient, eux non plus, rien de Gaulois. La Maison Carrée de Nîmes, de Vienne, le mausolée de Saint-Rémy offraient l’harmonieuse élégance de l’art grec. Partout où régnait Rome triomphait l’art gréco-romain et de grandes constructions utiles furent édifiées, aqueducs comme le Pont du Gard, amphithéâtres comme les arènes de Nîmes, d’Arles, théâtre comme celui d’Orange, arcs de triomphe, portes de villes, imposantes par la masse et par la solidité régulière des assises de pierre de taille, par la majesté vraiment romaine de leurs proportions.

Les Romains transformèrent matériellement et intellectuellement la Gaule et les Gaulois, s’inspirant de l’architecture romaine, abandonnant les pauvres « oppida » juchés sur les hauteurs et à l’étroit dans leurs enceintes construisirent dans les plaines de véritables villes. Gergovie par exemple, dont il ne reste plus trace sur le plateau basaltique auvergnat, fut remplacé par Augustonemetum (Clermont) et Bibracte, par Augustodunum (Autun).

Lorsqu’en 1878 on fit des fouilles pour établir au sommet du Puy-de-Dôme un observatoire météorologique, on découvrit, enseveli dans les terres et dans l’oubli, les ruines d’un temple dédié à Mercure. Les dimensions et les proportions de cet édifice donnent une idée de ce que furent les constructions romaines et le voyageur reste pensif en réfléchissant à la quantité d’esclaves qui durent travailler pour édifier à 1.465 m. d’altitude un monument de cette importance. Le Musée de Clermont est riche des découvertes et des trouvailles qui s’y firent et il faut conseiller au voyageur de ne pas quitter l’Auvergne sans aller faire une visite à ces ruines. Ce pèlerinage, qui en vaut bien d’autres, se suffit en soi.

La civilisation romaine se perdit par des excès de tout ordre et de toute nature ; le christianisme faisait son apparition dans la Gaule, le monde romain tombait en décrépitude et le Moyen Âge commençait.

De la disparition de l’Empire Romain jusqu’à la Renaissance, l’Architecture passe dans une période de transition entre l’antiquité et les temps modernes. Cette longue période de onze siècles qui débuta par une invasion des peuples que Rome appelait indistinctement des « Barbares » les Germains seuls devaient avoir une influence durable sur la civilisation occidentale en général et sur l’architecture en particulier. Quelques siècles d’une sombre ignorance s’écoulèrent et l’empire d’Orient commença à éclairer un art nouveau qui s’élaborait.

À Byzance les artistes s’inspirèrent de l’antiquité grecque qui leur apprit à ordonner avec grandeur et harmonie. Ils empruntèrent à l’Orient asiatique et à la Perse les richesses décoratives et au temps de Jus-

tinien, l’art byzantin prit sa physionomie caractéristique. La basilique de Sainte Sophie, qu’il fit reconstruire plus vaste et plus belle que le temple de Salomon, sous les ordres de deux architectes asiatiques, Anthemios de Tralles et Isidore de Milet, se termina en 537. Justinien pensait que sa Basilique serait pour le monde chrétien ce que le temple de Jérusalem avait été pour les Juifs. Sainte Sophie est un édifice à coupole. C’est aux temps lointains de la puissance assyrienne qu’il faut aller chercher l’origine de ce type de construction. Jamais on avait osé construire une aussi vaste salle et une coupole aussi hardie. Cette coupole, haute de 56 mètres, large de 32, est supportée par quatre grands arcs, de même diamètre qu’elle, reposant à leur tour sur quatre gros piliers. Entre les arcs et la circonférence intérieure de la coupole sont projetés d’énormes pendentifs, c’est-à-dire des triangles concaves. Deux des arcs embrassent des murs que soutiennent des colonnes. Sur les deux autres s’appuient deux demi-coupoles. Celle qui est du côté de l’Orient conduit à une triple abside. L’espace recouvert par ces voûtes géantes est au total de 7.000 mètres carrés. La décoration était éblouissante.

L’Empire d’Orient faillit être submergé et le monde chrétien tout entier bouleversé par l’invasion des Arabes, venus d’Orient, exaltés par une religion nouvelle qui venait de naître, « l’islamisme », œuvre de Mahomet. Si les arabes n’ont pas eu de peintres ni de sculpteurs, parce que le Coran défend de représenter des figures humaines, en revanche, leurs architectes, en s’inspirant des monuments byzantins et persans, créèrent un style original. Du septième au dixième siècle leurs monuments furent des mosquées, mais du dixième au quinzième siècle, ils déployèrent toute une fantaisie inventive. Leurs plus fameux monuments sont la mosquée d’Omar, à Jérusalem ; celle de Cordoue, puis celles de Tolède, de Hassan et de Kait-Bey, au Caire, et des palais tels que l’Alcazar de Séville, l’Alhambra de Grenade.

Si les édifices arabes ne sont pas très impressionnants vus de l’extérieur, c’est parce que les architectes ont appliqué leur génie à la décoration intérieure. Ils ont varié à l’infini les formes d’arc, ajoutant au plein cintre romain l’arc aigu ou brisé, l’arc en fer à cheval, l’arc en accolade ; ils ont inventé la voûte à stalactites, c’est-à-dire hérissée d’ornements en plâtre formés de prismes agglomérés. Le trait le plus caractéristique de leur art, c’est la décoration des murs par des arabesques. On dirait qu’ils sont tapissés de fines dentelles.

Malheureusement, les Arabes ne surent pas transformer et renouveler leurs idées et leur bel élan de curiosité s’arrêta au moment même où, en Occident, se produisait la Renaissance. Comme les Chinois, ils s’endormirent dans l’immobilité.

Pendant que s’édifiait et grandissait l’Empire d’Orient, l’évêque de Rome, humble à l’origine devant cette puissance, profita du déclin et de la décadence de l’empire byzantin pour acquérir une supériorité absolue qu’il détient encore aujourd’hui, c’est l’origine de la papauté. Une légende fut utile. On croyait que Saint Pierre était venu à Rome et y avait été martyrisé. Jésus-Christ aurait dit, selon une tradition aussi suspecte : « Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon église, et les portes de l’enfer ne prévaudront pas contre elle ». De là l’origine de la construction de ce qui fut appelé par la suite le Vatican.

Sous l’empire de Charlemagne, l’art carolingien ne fut ni intéressant, ni original. Constructions de beaucoup d’églises et de monastères en bois. Très peu ont subsisté. Les principaux architectes étaient des lettrés : Éginhard, Angilbert, Théodulfe, évêque d’Orléans. Ils