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Qu’est-ce donc que la carie dentaire ? La carie est l’altération des tissus durs de la dent. Cette altération est surtout caractérisée par sa nature infectieuse. Diverses causes ont altéré ces tissus : traumatiques, chimiques, maladies, etc… Aussitôt les microorganismes s’introduisent dans les canalicules de l’ivoire désorganisant, par leur action nécrogène, plus ou moins complètement la dent. Si on n’intervient pas, si la nature ne peut réagir, la dent se désintègre complètement et peut amener des complications graves.

On s’aperçoit de jour en jour de l’importance du milieu buccal sur l’état général et inversement. Aussi, en pathologie générale, on ne peut pas ne pas se préoccuper de la bouche, véritable carrefour des voies digestives et respiratoires. En effet, on peut dire que les neuf dixièmes des maladies infectieuses ont leur porte d’entrée par la bouche. Irritation de l’estomac recevant des aliments mal triturés et infectés, provoquant des gastrites septiques. L’absorption continuelle de pus peut provoquer des affections du foie, des reins, du cœur, du cerveau. Je puis citer le cas de la sœur d’un camarade que l’on traitait dans une clinique pour son système nerveux détraqué. Bromure, douche, tel était le traitement. La simple extraction de ses dents mauvaises, au nombre de 17, remit, en quelques semaines, cette personne dans son état normal. Chez les fumeurs par exemple le cancer a plus de chance de se développer dans une bouche malpropre. On peut dire que le cancer guette le fumeur aux dents sales. Au cours d’épidémies, les personnes ayant une bouche en mauvais état sont les plus touchées. Presque tous les microbes peuvent se trouver dans la bouche à l’état normal sans provoquer aucune manifestation pathologique ; mais il suffit d’un état de moindre résistance pour que l’équilibre biologique soit rompu.

Il faut donc, à l’état normal, avoir une hygiène bucco-dentaire rigoureuse et à plus forte raison au cours de maladie ou d’accidents graves. Une brosse dure et du savon de Marseille sont des armes indispensables pour voir dans un gracieux sourire une belle rangée de perles se détachant d’une gencive rose et ferme.

Nos cabinets dentaires modernes disposent de moyens scientifiques pour soigner et guérir sans aucune douleur. La thérapeutique dentaire a acquis les mêmes progrès que la thérapeutique médicale. L’art dentaire bénéficie des moyens chimiques et électriques soit pour la désinfection, la stérilisation électrique, Rayons X, haute-fréquence, les anesthésiques, etc…La prothèse dentaire s’est surtout manifestée par les travaux d’or et de porcelaine qui permettent de remplacer et de remplir parfaitement la fonction naturelle disparue. L’orthodontie a permis de régulariser une denture en position vicieuse et le professeur P. Robin, des Enfants malades, a transporté sur les mâchoires et sur la face cette théorie, obtenant ainsi des résultats surprenants. Il existe, dans beaucoup d’hôpitaux de Paris, des services dentaires gratuits, où le dévouement des professeurs et des élèves est sans égal, mais où l’administration de notre régime routinier et arbitraire empêche d’étendre plus largement ces services qui ne sont pas outillés comme ils devraient l’être. Quoi qu’il en soit, il n’est plus permis, de nos jours, d’avoir peur de souffrir chez le dentiste. À mesure que le progrès rentrait par la porte, la douleur se sauvait pas la fenêtre. — M. Parant.

N. B. — Les exemples cités dans la première partie de cette étude, sont empruntés à Dagey.


DÉNUEMENT. n. m. État de l’être dépourvu de tout ce qui est indispensable à la vie. S’applique à l’individu et à la collectivité. Cet homme est dans le

plus complet dénuement. Cette famille se trouvait dans le plus terrible dénuement. Le dénuement est une des manifestations de l’ordre bourgeois. N’est-il pas affreux de songer que de nombreuses familles souffrent de la faim, que des petits enfants n’ont pas de quoi se nourrir, alors que les magasins regorgent de vivres et que la richesse s’étale honteusement aux yeux de tous ? La philanthropie cherche à amoindrir les effets du dénuement et les philanthropes s’imaginent que l’aumône est capable de résoudre le problème de la misère ; la presse bien pensante verse de temps en temps un pleur sur le dénuement qui a poussé une famille au suicide ; tout cela est une sinistre comédie qui ne fait que perpétuer un état de chose criminel, et les résultats obtenus par ce genre d’action sont plus malfaisants qu’on ne le pense.

C’est surtout dans la grande ville que l’on assiste au pénible spectacle de la misère et Paris, la « capitale du monde » regorge de malheureux dénués de tout moyen d’existence. Il suffit, pour s’en rendre compte, de s’arrêter un instant, par les froids matins d’hiver, devant les « soupes populaires » qui distribuent gratuitement un bol d’eau chaude qualifié bouillon. Ils sont là des centaines et des centaines de pauvres hères, sans foyer, sans famille, sans une main amie qui vienne se tendre pour soulager leur détresse, et qui attendent, par la pluie, par le vent, que la porte s’ouvre pour s’engouffrer dans une salle étroite et puante où, pendant quelques minutes, ils auront l’illusion de la chaleur. Qui sont-ils, d’où viennent-ils, tous ces miséreux ? Ce sont des travailleurs qui se sont, un jour, trouvés sans ouvrage et qui, petit à petit, ont tout perdu de ce qu’ils avaient, eux qui n’avaient pas grand-chose ; ce sont des bacheliers qui traînent leurs diplômes avec leur pauvreté et qui ne trouvent pas à vendre leur savoir ; ce sont des inconscients perdus dans la vie et qui ont été élevés dans les larmes ; c’est le rebut de l’humanité, c’est le déchet de la société, c’est la conséquence du désordre social, c’est la souffrance née de la richesse des uns, c’est le capitalisme qui livre à la charité publique le trop plein de la chair à travail. Et ils sont, de par le monde, des millions comme cela. Qui n’a entendu parler de Londres et de ses mendiants, qui cherchent la nuit un refuge sous les ponts de la Tamise ? Et dans toutes les capitales, et dans toutes les grandes cités où le luxe s’étale avec impudence, il en est de même, car le luxe et la fortune des uns ne reposent que sur la misère des autres.

Ce n’est pas un sentiment de pitié qui doit nous envahir devant un tel spectacle, c’est un sentiment de révolte. La pitié n’a jamais rien fait et ne fera jamais rien. À quoi bon larmoyer et se lamenter sur l’inégalité et l’injustice sociales ? Il faut réagir et lutter contre les forces mauvaises qui déterminent un tel état de choses et le dénuement fera place au bien-être lorsque les hommes voudront comprendre que leur force est en eux-mêmes et qu’il leur est possible, s’ils le veulent, de transformer cette société où le bonheur des uns n’est fait que de la misère des autres.


DÉPENDANCE. n. f. Être sous la dépendance de…, c’est-à-dire dépendre, être subordonné, être placé sous l’autorité de quelqu’un ou de quelque chose. Ne pas être indépendant. L’esclave était dans la dépendance de son maître, l’ouvrier est dans la dépendance de son exploiteur. « Dépendre, c’est, selon la plus claire notion et la plus évidente, être tenu d’obéir » (Bourdaloue). Or, dans la société actuelle, de gré ou de force, l’homme est contraint d’obéir, de se courber devant les exigences ridicules des institutions et est, par conséquent, dans la dépendance de cette société. Il est impossible d’échapper à la loi féroce de l’autorité, et les « en dehors » ou ceux qui supposent l’être,