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autre pantin qui se livrerait aux mêmes inconséquences et aux mêmes abus. Il en est de même, pour le fantoche espagnol, qui mène son pays à la ruine. Primo de Rivera peut s’effacer, les ravages du despotisme ne s’arrêteront, que lorsque le despotisme sera écrasé sous le talon populaire..

Ne confondons donc pas les effets et les causes. C’est à la source qu’il faut remonter pour trouver une solution logique et raisonnable, et c’est parce que toutes les écoles politiques et sociales s’y refusent, qu’elles sont incapables de résoudre le problème posé depuis si longtemps devant l’humanité.

A quoi bon s’élever contre la tyrannie d’un despote, contre l’exercice arbitraire d’un pouvoir si les remèdes que l’on apporte ne sont pas susceptibles d’arrêter le mal ? A quoi bon protester contre les abus, contre les crimes du despotisme, si toutes les formes de gouvernement qu’on lui oppose, renferment également le virus malfaisant oui inévitablement, engendrera, en évoluant, les mêmes méfaits ? La politique du moindre mal est à nos yeux ridicule et dangereuse, car elle donne au peuple une espérance stérile, qui ne se traduit en fin de compte que par la désillusion et le découragement.

« A quoi bon changer, dit le peuple, c’est toujours la même chose ! » C’est toujours la même chose, parce qu’il le veut ainsi ; c’est toujours la même chose parce qu’il se refuse à écouter la voix de la raison ; c’est toujours la même chose, parce que après avoir été trompé par Pierre, il consent à être trompé par Paul et ne veut pas trouver en lui la force et l’énergie de détruire les causes déterminantes de sa souffrance et de sa misère. C’est toujours la même chose parce qu’il ne veut pas que ça change.

Le despotisme peut disparaître, doit disparaître. Il peut céder la place à une forme d’organisation répondant au désir de liberté de la collectivité, mais il ne suffit pas pour cela du courage et de l’héroïsme de quelques individus qui, se sacrifiant, débarrassent de temps à autre l’humanité d’un despote, car le despotisme survit au despote. Il faut la force coalisée de tous les opprimés, de tous les parias, la révolte consciente de tous les hommes nouveaux et d’avenir, pour monter à l’assaut du Capital et de l’Autorité qui en sont les causes déterminantes. Alors, le despotisme aura vécu.


DESSEIN. n. m. Le mot dessein signifie : projet, intention résolution. Avoir de grands desseins, de beaux desseins, de nobles desseins, des desseins hardis, de sombres desseins.

Non ; quoi que vous disiez, cet horrible dessein
Ne fut jamais, seigneur, conçu dans votre sein.

Racine.

Mettre ses desseins à exécution, c’est-à-dire exécuter ce que l’on avait conçu, prémédité, arrêté, envisagé. Nourrir de sinistres desseins à l’égard de quelqu’un, c’est-à-dire chercher des moyens de lui nuire, de lui faire du mal.

Les desseins de Dieu sont impénétrables, disent les croyants. Mais ceux des hommes qui font commerce de la religion ne le sont pas et il est triste de constater qu’ils viennent souvent à bout de ces desseins, qui consistent à abêtir le peuple pour le mieux maintenir dans l’esclavage. Et les prêtres qui nourrissent d’inavouables desseins sont nombreux. Ils ne se rencontrent pas seulement dans les églises où les fidèles idolâtrent des dieux spirituels mais aussi dans les églises civiles, plus dangereuses peut-être que les autres. Les desseins du politicien qui siège au Palais-Bourbon, à l’extrême-gauche ou à l’extrême-droite, ne sont pas moins intéressés que ceux d’un quelconque curé ou pasteur, et les plans qu’il élabore sont tous destinés à lui assurer une vie

large et facile, au détriment de la masse d’aveugles qui l’adorent.

Et le peuple, lui, n’a pas de desseins bien définis et c’est la cause pour laquelle il est facile de l’exploiter. Lorsqu’il aura formé le dessein de se libérer, et travaillera courageusement à sa réalisation, alors seront voués à un échec certain tous les sombres desseins de ses oppresseurs.


DESSIN. n. m. Le dessin est l’art d’imiter, en se servant de lignes, la forme des choses, des objets, des individus. Avec la musique, le dessin a dû être le premier des arts, car s’il fut de tous temps naturel à l’homme de manifester sa joie ou sa peine, sa gaîté ou sa tristesse, par des cris, des sons, des intonations, aux époques reculées de l’humanité, alors que les progrès de la civilisation n’avaient pas encore apporté à l’individu un bagage suffisant de connaissances, le dessin a été pour lui l’unique moyen de conserver la forme d’êtres ou d’objets qui lui étaient chers, ou encore de manifester ses désirs et ses besoins lorsque la parole n’arrivait pas à refléter sa pensée.

Certains historiens prétendent que le dessin fut inventé par une jeune fille grecque qui, voulant conserver les traits de son amant, traça sur le mur le contour le son ombre. Cette explication est sans fondement et il nous semble que l’on ne peut attribuer à personne l’invention du dessin qui se perd dans la nuit des temps ; le plus raisonnable est de supposer que, aux âges les plus lointains de l’histoire, l’homme a cherché à imiter, sur le sable ou sur la pierre, l’image qui se présentait à lui sous une forme quelconque.

Ce qui est certain, c’est que le dessin a précédé la sculpture et la peinture, dont il est le principe fondamental et, bien que peu expressif et plutôt grave, il présentait déjà un certain esprit artistique chez les Égyptiens. Il acquit par la suite de la souplesse, de la beauté et de l’élégance pour arriver à atteindre de nos jours au plus haut degré de perfection.

Il y a plusieurs sortes de dessins. Le dessin au crayon, à la plume, à l’estompe, etc., etc…, mais, quelle que soit sa qualité, il nécessite de la part de celui qui l’exerce une connaissance assez étendue de l’anatomie, de la perspective et de l’expression, pour rendre et reproduire les caractères, les mouvements et les gestes d’une façon naturelle et artistique.

Le dessin n’offre pas seulement des satisfactions à la vue et à l’esprit, il trouve aussi son utilité dans l’industrie. Les progrès de la science, et plus particulièrement du machinisme dans toutes ses manifestations, nécessite l’emploi d’une armée de dessinateurs, qui ne doivent pas être seulement des artistes, mais aussi des techniciens. La connaissance du dessin géométrique facilite la tâche de l’ouvrier qui a à fabriquer une pièce quelconque et son étude ne saurait trop lui être recommandée, car il tient lieu de parole et d’écrit dans tous les arts mécaniques.

Le dessin est donc un art utile et agréable, qui nous offre de multiples jouissances à tous les moments de notre existence. Si la maison que nous habitons a été, avant d’être bâtie, dessinée sur le papier par les soins de l’architecte, le papier peint qui couvre les murs de nos appartements et qui égaie un peu le modeste logis du travailleur, est également dû au dessin de l’artiste ignoré et inconnu qui a su combiner les quelques couleurs mises à sa disposition. Et il en est de même pour les étoffes que nous portons, pour les broderies et les dentelles qui ornent le linge, pour les tapis, enfin pour tout ce qui nous entoure et flatte notre vue. Le dessin est donc utile, nécessaire, indispensable au peuple, puisqu’il lui procure certaines satisfactions et si tous les dessinateurs ne sont pas de très grands artistes et si