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qu’ils s’efforcent d’enseigner leurs dogmes dès le plus jeune âge.

Pendant la dernière période de l’enfance, l’enfant est facilement suggestible, a une imagination vive et manque d’esprit critique. Il s’ensuit que les enfants de cet âge altèrent souvent la vérité sans le vouloir. Il faut évidemment que les adultes évitent de laisser passer de telles déformations involontaires de la vérité ; mais il importe aussi qu’ils les distinguent des mensonges vrais. Ce serait cultiver le mensonge que de punir des erreurs involontaires. Dans l’éducation de l’enfant, la punition doit être considérée comme un pis-aller et les éducateurs doivent s’efforcer d’en éviter l’emploi comme aussi, d’ailleurs, celui des récompenses.

Pour corriger ces « mensonges » involontaires, il faut s’attaquer à leurs causes en apprenant à l’enfant à bien observer, à formuler sa pensée avec précision, à régler son imagination, à faire usage de l’esprit critique.

A la fin de la troisième enfance, l’enfant devient un idéaliste, il s’intéresse aux grandes œuvres, aux nobles actions, à la vie des grands hommes. De cet intérêt enfantin il est évident que l’éducation doit tirer parti, soit en racontant de belles vies de travailleurs, de bienfaiteurs de l’humanité, de martyrs de la liberté et en particulier de la liberté de pensée ; soit en montrant les grandes œuvres réalisées par l’entraide ; soit aussi en montrant les méfaits des grands conquérants, des tyrans, etc… qu’on fait encore trop souvent admirer dans les écoles d’aujourd’hui.

Rappelons, pour finir, la nécessité des loisirs et celle des travaux libres, individuels ou collectifs dons nous avons parlé plus longuement au mot « École ».



L’adolescence (de 12 à 18 ans). L’adolescence est une période de profonde transformation chez l’enfant.

Au point de vue physiologique la crise de la puberté, qui en marque le début, est un ensemble de crises endocriniennes.

Les glandes endocrines qui produisent des sécrétions internes exercent une action considérable sur l’activité cérébrale et mentale, mais dont on n’a commencé l’étude que depuis un petit nombre d’années.

Lors de la puberté on peut constater : 1° une crise de la régression du thymus ; 2° une crise sexuelle caractérisée principalement par l’apparition de la faculté génératrice ; 3° une crise de croissance d’origine polyglandulaire (thyroïde, surrénale, hypophyse).

Au point de vue psychologique on constate alors surtout le besoin d’indépendance. Si les adultes n’ont pas, auparavant, préparé l’émancipation graduelle de l’enfant, un conflit se produit alors entre eux et l’adolescent qui devient indocile et révolté. C’est alors « l’âge ingrat » : l’adolescent ne veut plus se laisser conduire et est encore incapable de se conduire lui-même comme il faudrait.

L’adolescent s’intéresse aux problèmes moraux et sociaux ainsi qu’aux questions sexuelles. Mais si l’adolescence est marquée par certains caractères communs aux deux sexes : éveil de la personnalité, altruisme, développement de l’affectivité, mécontentement fréquent dans la famille, d’autres caractères viennent différencier les individus des deux sexes : alors que le garçon devient généralement hardi, bruyant, violent, querelleur, fanfaron, la fille au contraire devient moins expressive, elle intériorise davantage sa vie psychique, devient plus timide, plus modeste.

Les éducateurs doivent prévoir la crise de la puberté soit en préparant l’émancipation graduelle de l’enfant, soit en veillant à son hygiène, soit en faisant avec tact son éducation sexuelle.

L’adolescent rêve de l’avenir, il faut avec patience et tact s’efforcer de guider ces rêves, en s’efforçant de le détourner des faux idéaux, du mysticisme par exemple.



Anormaux. — Le développement de l’enfant et de l’adolescent, tel que nous venons de l’étudier, ne s’applique évidemment qu’aux enfants normaux.

L’évolution des enfants anormaux varie trop pour que nous puissions l’étudier ici. Non seulement l’évolution intellectuelle de ces enfants est plus lente, mais encore elle manque d’équilibre.

À ces enfants convient par suite un enseignement individualisé et plus concret que sont seuls capables de donner des éducateurs patients, dévoués et éclairés. — G. Delaunay.


ENFER n. m. (du latin inferi, lieu bas). L’enfer est le lieu destiné aux supplices des damnés de Dieu. Nul n’ignore qu’en son infinie sagesse Dieu, maître suprême, a prévu, pour après la mort et le jugement dernier des hommes, la récompense pour les bons et le châtiment pour les méchants.

Dans sa remarquable étude sur l’Imposture Religieuse, Sébastien Faure nous dit que « l’Enfer est la négation de l’infinie Bonté » et il ajoute : « Je soutiens que l’existence de l’Enfer nie l’existence de Dieu, parce qu’elle proteste contre l’infinie Bonté » et il termine en ces termes : « Ou bien il n’y a pas d’Enfer, ou bien Dieu n’est pas infiniment bon ». Logique raisonnement que tout cela, répondra l’Église, et l’on sait que l’Église ne s’embarrasse pas de logique et de raison. Elle affirme, c’est bien plus simple ; les naïfs n’ont qu’à croire.

Certains « philosophes » placent l’enfer au centre de la terre ; d’autres dans le soleil ; d’autres prétendent qu’il n’y a pas d’enfer. Plaçons-le dans l’imagination de l’homme, nous serons, je pense, dans la vérité.

Pourquoi, diront certains, s’arrêter à de telles niaiseries, et perdre son temps à dénoncer un « Enfer » qui n’effraie plus que les enfants en bas âge, et ne sert de thème qu’à des conteurs fantastiques ? Il serait à souhaiter qu’en notre siècle de science l’influence de l’Enfer soit nulle. La réalité est, hélas, tout autre, et l’enfer exerce toujours ses ravages sur les classes ignorantes.

Il est évident qu’à mesure que l’individu évolue cérébralement, que ses connaissances s’étendent, que son intelligence se développe, l’idée de l’enfer s’estompe, se localise, se cache dans un coin de son cerveau, mais elle a tellement pénétré l’esprit humain que nous voyons cette idée réapparaître, sitôt que l’individu est menacé par un danger mortel.

La peur de la mort n’est-elle pas, en réalité, la peur de l’Enfer ? Même pour celui qui s’affirme « libre penseur », la crainte du néant n’est, en vérité, qu’une peur incomprise et inexpliquée de l’Enfer. Chez le croyant qui fait appel, lorsqu’il arrive au terme de la vie, au concours du prêtre, et réclame de lui l’absolution de ses péchés, c’est l’espérance du ciel qui le fait agir et l’on conçoit encore la terreur qui l’anime. Il croit, lui, ouvertement, franchement, à l’existence d’un lieu de supplices où il aura à payer durant une éternité ses erreurs terrestres. Il cherche à échapper aux tourments infernaux qui le menacent. Mais, comment expliquer la peur de la mort, l’épouvante qui s’empare de celui qui se dit incroyant ? Eh bien, c’est toute l’hérédité, c’est toute l’éducation faussée qui revient à la surface, c’est l’incertitude du Néant, et cette incertitude, c’est l’Enfer.