Page:Faure - Encyclopédie anarchiste, tome 4.2.djvu/308

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
TRO
2806

travaux aux pièces et pour l’unification du prix de l’heure ; elle commençait à donner de bons résultats quand survint la guerre en 1914, laquelle anéantit ce qui avait été conquis. L’égoïsme individuel remplaça la solidarité qui avait fait un grand pas dans l’esprit des travailleurs de l’ameublement.

Depuis qu’est terminée l’horrible guerre, le marché de la trôle a disparu ; la mort atteignit 1es travailleurs qui devinrent moins nombreux, les démolitions des villes et des villages par le feu et la mitraille, mobiliers et agencements, durent être remplacés d’abord par du provisoire, puis par des meubles plus stables, De 1918 à 1930, le meuble s’est fabriqué sans trêves très marquées ; les demandes affluant, tous les ouvriers sont occupés, la trôle n’existe plus.

Ce qui ressort de cette dernière période où tous travaillent intensément avec des machines perfectionnées qui spécialisent et rationalisent le travail, où on voit les salaires s’élever, c’est que presque tous ne virent plus qu’ils n’étaient quand même que des salariés, esclaves du Capital. La plupart, parce qu’ils possédaient quelques économies croyaient que cela était une fin et qu’ils étaient à l’abri de la misère.

En 1931, on commence à se rendre à la triste évidence, on déchante ; par la surproduction, de nombreux exploiteurs sont devenus des fortunés millionnaires ; la trôle n’est plus et le spectre de la misère apparaît sans qu’on en aperçoive la fin, tandis que le Capitalisme reste le maître du monde. Le chômage, par la surproduction, est général ; chaque jour, les ateliers se ferment ; que sera demain ? Si les travailleurs tombent dans l’avachissement de l’aumône, ne comptent que sur les secours du chômage ; si, enfin, ils ne prennent pas conscience de sujets qu’ils sont de la finance. Les gouvernants garantissent le règne du capitalisme par le cataplasme antirévolutionnaire des indemnités aux chômeurs, palliatif qui assure à la bourgeoisie, par la veulerie populaire, la continuation de sa suprématie sur le travail.

Souhaitons que les travailleurs s’unissent dans les syndicats révolutionnaires qui mènent la lutte de classe contre les exploiteurs, l’État et les politiciens ; qu’ils s’entendent pour détruire les causes de leur misère qui est entièrement dans leur soumission au Capital et à l’État. Qu’ils soient enfin des êtres libres dans une société libre, où les dieux et les maîtres auront disparu. — L. Guerineau.


TROMBE (ou TORNADES) n. f. Nom donné à une colonne d’eau ou de vapeur mue en tourbillon par le vent.

Pendant la belle saison, quand l’air est agité, de petits tourbillons se produisent souvent. Ils soulèvent de la poussière, des feuilles mortes, de la paille, secouent violemment les rameaux des arbres. Ces petites trombes se forment aux endroits où la terre est nue et fortement chauffée par le soleil. Elles semblent être produites par une rupture de l’équilibre de l’air, due à un échauffement local. Elles n’amènent aucun dégât.

Les vraies trombes sont constituées par des nuages opaques noirâtres. Ce sont des appendices des nuages avec qui elles se déplacent de concert. Elles forment des tourbillons dont le diamètre ne dépasse pas quelques centaines de mètres. Elles sont accompagnées généralement d’un vent violent, soufflant en tempête et produisant éclairs, pluie ou grêle. Sur terre, elles sont animées d’un mouvement de rotation aspiratoire qui peut dessécher de petits cours d’eau, des étangs peu étendus, des mares. Sur mer, les trombes d’eau résultent de l’aspiration des eaux par le mouvement tourbillonnaire du vent. Elles se déplacent ordinairement très rapidement en produisant un grand bruit. Parfois, mais rarement, on a vu des trombes rester stationnaires. Elles apparaissent volontiers lorsque la

situation atmosphérique générale est orageuse. Elles semblent dues à une rupture d’équilibre se produisant à une grande hauteur dans l’atmosphère. Une fois engendrés dans les nuages, les tourbillons se propagent vers la terre. Mais une température élevée n’est pas indispensable pour la formation des trombes. Il s’en est produit, en décembre 1887, à Upsal, avec une température maximum de 6 degrés. Elles peuvent causer de grands dégâts. La terre et les objets placés à la surface du sol sont soulevés par les trombes. Elles brisent ou renversent les arbres, démolissent les toits et même les maisons. Citons les trombes désastreuses de Saint-Claude (Jura), en 1800 ; Cette (Hérault) et Maisons-Laffitte (Seine-et-Oise), en 1892 ; Asnières, en 1897 ; Ath, en Belgique, en août 1900 ; Florennes, en 1902. Les États-Unis d’Amérique sont plus souvent ravagés que d’autres régions par des trombes désastreuses. — Ch. Alexandre.


TROUBADOUR et TROUVÈRE (Ces deux mots se rattachent au verbe trouver, pris au sens ancien de composer en vers ; mais trouvère est la forme du cas sujet dans la langue d’oïl (le cas régime est troveor), tandis que troubadour (ou plutôt trobador) est la forme régime dans la langue d’oc (le cas sujet est trobaire).

N. m. Litter. : poète ayant composé dans l’ancienne langue française. (Le premier de ces deux mots désigne les poètes en langue d’oc, le second ceux en langue d’oïl) : Dictionnaire Larousse.

De même source, nous trouvons encore sur ces mots : Encycl. Les ancêtres des troubadours et des trouvères sont les jongleurs. De bonne heure, à l’art de réciter des vers, quelques jongleurs joignirent celui d’en composer : ce sont ceux-là qui furent qualifiés « trouveurs ». Les troubadours allaient ordinairement de Cour en cour, séjournant plus ou moins longtemps dans chacune d’elles, selon le succès qu’ils y obtenaient. Au nord, au contraire, nous voyons d’assez bonne heure des trouvères attachés à la personne des grands seigneurs : Robert d’Artois et Charles d’Anjou, au XIIIe siècle, en avaient plusieurs à leurs gages. C’est surtout dans ce milieu seigneurial que le rôle et la condition des trouvères se transforma. Bientôt, en effet, quelques-uns furent jugés capables d’écrire et de transmettre à la postérité les faits et gestes de leurs protecteurs : ils devinrent alors de véritables historiographes ; ainsi, Froissart, Chastellain, Molinet et Meschinot. La condition du trouvère était surtout fort rehaussée s’il savait le latin : on lui demandait alors de traduire ou d’imiter les œuvres de l’antiquité, où l’on croyait qu’était renfermée toute science. C’est le rôle que jouent, à la cour des rois d’Angleterre, Wace et Benoit de Sainte More. Enfin, il va sans dire que l’art de composer n’était pas le privilège de cette caste plus ou moins asservie : des bourgeois, et même de fort grands seigneurs y acquirent ce qu’on appellerait aujourd’hui un beau talent d’amateur ; tels, au XIIIe siècle, Jacques Bretel, Thibaut de Champagne, le châtelain de Coucy et, au XVe siècle, Charles d’Orléans.

« Il ne saurait être question de citer ici même les plus connus parmi les trouvères et troubadours ; nous nous bornerons à les classer par groupes en indiquant sommairement les caractères dominants de chacun de ceux-ci. C’est le Limousin et le Périgord qui furent le berceau de la poésie courtoise ; c’est aussi à cette région qu’appartiennent les poètes les plus anciens et les plus estimés, dans ce genre : Bernard de Ventadour, Guiraud de Borneil, Arnaut de Mareuil, Arnaut Daniel ; quelques-uns des troubadours les plus anciens sont originaires de la Gascogne et avaient commencé par être jongleurs (Cercamon, Marcabrun, Marcoat). A l’Auvergne et au Velay appartiennent Peire d’Auvergne, Pierre Cardinal, le Moine de Mautoudon ; au Languedoc, Peire Vidal, Raimon de Miraval, Aimeric de Peghilhan, Gui-