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les humains en général, est une influence morale qui peut être exercée réciproquement et également par l’un et l’autre. D’ailleurs, la stupidité de l’ « autorité maritale » tient à l’absurdité générale du « mariage ».

Arrêtons-nous succinctement à quelques autres genres d’autorité morale, énumérés au début de la présente étude.

L’autorité de la chose jugée, de même que toutes sortes d’influences ayant pour base l’ignorance, la faiblesse de la volonté, le non-désir de réfléchir indépendamment, librement, sont des phénomènes négatifs et condamnables. Un homme sain d’esprit ne doit rien accepter à la légère, sans vérification personnelle, sans raisonnement. Il n’y a rien de plus écœurant que de voir un homme accepter et affirmer une chose parce qu’ « on le dit », parce que « tout le monde le fait », parce qu’un tel l’affirme, etc… Ce n’est que la propre conscience, un raisonnement personnel, indépendant, approfondi, une conviction acquise dans son for intérieur, indépendamment des jugements et des paroles des autres, qui doivent être « autorité » pour l’homme.

Sous l’autorité des mots on comprend l’influence qu’exercent sur nous de simples paroles, sans que nous réfléchissions à leur véritable sens. La mauvaise habitude de parler, de raisonner, même de penser avec des mots, souvent vides de tout sens, est très répandue à notre époque. Il faut tâcher de s’en défaire, d’analyser les mots et les notions qu’ils expriment, de ne se servir que de paroles sensées, précises, de ne jamais tomber sous l’influence des mots.

Quant aux soi-disant autorités dans le domaine de la Science, de l’Art, de la Pensée, etc., on peut les accepter dans une certaine mesure, avec une certaine réserve. Il ne faut jamais ni se dépêcher de reconnaître les « autorités » facilement fabriquées par la foule ou sciemment lancées par les milieux bourgeois, ni imiter en esclave ou accepter sans critique celles reconnues en toute justice. Il faut toujours scruter, vérifier, analyser, réfléchir soi-même ; il faut savoir garder l’indépendance entière de son propre jugement ; il faut créer personnellement, librement ; bref, il ne faut se soumettre, se plier à aucune autorité, quelle qu’elle soit. Ce n’est qu’une certaine influence d’un savant, penseur ou artiste réellement puissant et valeureux, influence libre, sciemment acceptée dans une mesure raisonnable, qui peut être précieuse, utile et profitable.

Pour conclure ; disons quelques mots sur la réflexion citée plus haut : notamment, que dans aucune société, même la plus libre, on ne pourrait se passer d’une certaine autorité exercée par les plus forts, les mieux doués, les plus intelligents, etc. Dans les usines, dans les ateliers, dans les administrations les plus librement organisées, — dit-on, — il y aura toujours des chefs, des individus qui, sachant faire mieux, exerceront une certaine contrainte, une autorité. Il y aura toujours des gens qui dirigeront, qui guideront, qui organiseront, qui commanderont, qui diront : il faut faire ceci, il faut faire cela, tu feras ainsi, etc. L’élément de la contrainte ne pourra donc jamais disparaître totalement.

Un tel raisonnement démontre une fois de plus l’incapacité de voir à l’avance l’ambiance entière d’un travail libre, d’une action vive, indépendante, fraternelle. Il va de soi que dans toutes les branches de l’activité humaine, il y aura des hommes plus capables, plus intelligents, en un mot plus forts que les autres. Mais dans un travail, dans une activité en camarades, dans une société normale, cette supériorité naturelle sera acceptée par tous comme une chose donnée, entendue, légitime. L’autorité des uns sur les autres sera une autorité purement morale, autorité du métier et de la compétence, autorité momentanée, qui ne s’exercera qu’à l’instant même de l’action, du labeur en marche.

Cette autorité sera librement acceptée, comme saine et utile, en pleine connaissance de cause, par tous ceux qui, dans cette branche, ne possèdent pas les mêmes aptitudes. Ce sera l’autorité d’un camarade plus expérimenté, plus habile, plus intelligent dans ce domaine. Jamais, dans une telle société, le plus fort n’aura la moindre idée de gouverner, de devenir un chef, de subjuguer, etc. Jamais non plus, les plus faibles ne se considéreront comme des sujets, des esclaves, des gouvernés. Cette autorité s’exercera d’un commun accord, à force de reconnaître son utilité, sa nécessité. Cette autorité, exercée dans un milieu sain, au moment et à l’occasion d’un travail vif, agréable, conscient, fraternel, libre, ne pourra jamais blesser personne. Elle n’a rien à voir avec l’autorité malfaisante de nos chefs et contremaîtres. C’est d’une façon naturelle, pendant le travail commun, que certains hommes se montreront plus capables et prendront de ce fait, et de façon également naturelle, les fonctions d’organisateurs du travail, etc. Et puis, les hommes qui seront peu capables dans un métier quelconque, auront eux-mêmes des aptitudes au-dessus des moyennes dans une autre branche d’activité. Celui qui ne réussit pas, qui doit être guidé aujourd’hui (de son plein gré), réussira demain ; celui qui ne fait pas grand’chose ici, accomplira des merveilles là. En tout cas, il s’agira alors non pas d’une contrainte, mais d’une libre entente ; non pas d’une autorité brutale, mais d’une influence normale, variée et réciproque, des uns sur les autres.

On nous dira, peut-être, que, au commencement, en tous cas, certains restes de l’Autorité seront inévitables. Nous ne disons pas le contraire. Ce que nous affirmons, c’est qu’il faut, dès l’origine, lutter activement contre ces restes, au lieu de les accepter ; qu’il faut commencer à marcher tout de suite dans la direction voulue et désirable. La nouvelle ambiance sociale ne fera que favoriser considérablement cette lutte et cette marche, dès le début.

Une influence naturelle, librement acceptée, une autorité purement morale, dans le véritable sens du mot, exercée d’un commun accord, dans un but concret, dans une ambiance de camaraderie générale, autorité basée sur une supériorité ou une expérience reconnues par tous, autorité utile, indispensable pour le succès de la tâche et pratiquée dans l’intérêt de tous, de façon désintéressée, amicale, fraternelle, — telle est la seule Autorité acceptable, non seulement pour un anarchiste, mais pour tout homme libre et digne. Cette autorité-là, nous la désirons même en toute tranquillité, nous l’admettons, nous la prévoyons, nous l’attendons, en toute connaissance de cause. — Voline


AVATAR. n. m. (sanscrit : avatâra), Avatar est le nom donné, dans l’Inde, aux incarnations d’un dieu, surtout à celles de Vichnou. Par analogie, le mot avatar en est venu à désigner une transformation, une métamorphose. Ex : Les avatars d’un homme politique. Comme l’apostasie, l’avatar est une chose très courante en politique ; quel politicien n’a pas eu ses avatars ? Il suffit, en général, pour les provoquer, d’un manque d’argent, d’une chute de ministère ou d’un poste rémunérateur à obtenir. Ce sont là, en effet, des contingences qui ne sauraient laisser indifférent un politicien, et qui ajoutent régulièrement un avatar de plus à son actif. Les anarchistes n’admettent pas les avatars en matière de politique, et savent les châtier à l’occasion. (Se reporter à apostasie.)


AVIATION. n f. (du latin avis, oiseau). Système de navigation aérienne, au moyen d’appareils plus lourds que l’air et imitant le vol des oiseaux.

Les hommes ont cherché depuis les temps les plus reculés, à voler comme le font les oiseaux, et les histo-