Page:Faure - Encyclopédie anarchiste, tome 1.djvu/383

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
CON
382


CONCESSION. n. f. (du latin : concedere.). Accorder un privilège ; faire don à quelqu’un de propriétés, de territoires, etc, etc…

Commercialement, administrativement, gouvernementalement, la « concession », est le pouvoir accordé à une personne ou à une société d’exploiter, durant un temps déterminé ou indéterminé, un domaine qui ne lui appartient pas. Naturellement, ce sont toujours les mêmes qui profitent des concessions.

Les domaines d’État, les grandes administrations, les exploitations coloniales, sont d’ordinaire cédés à des concessionnaires qui en tirent d’énormes bénéfices, et bien souvent sans avoir même risqué le moindre capital dans l’entreprise qui leur a été concédée. Les chemins de fer, les mines ne sont que des concessions accordées par l’État à certains syndicats de financiers et d’industriels. Le public ne tire aucun profit de toutes ces concessions. Une seule et unique concession est accordée au peuple par les gouvernants : c’est celle de pouvoir pourrir et se décomposer après sa mort dans un domaine de l’État, le cimetière. C’est ce que l’on appelle une « concession gratuite ».

En rhétorique, la concession consiste à abandonner à un adversaire une partie de la discussion et reconnaître la valeur de certains de ses arguments. « Je vous fais cette concession que la République fut, à ses origines, acclamée par le peuple ; c’est qu’il en ignorait les rouages. » Faire des concessions à un adversaire politique, c’est dans une certaine mesure abandonner le terrain, mais lorsque ces concessions sont loyales et sincères, elles n’entachent pas l’honorabilité et la moralité de celui qui les fait. Il en est autrement lorsqu’un individu se désiste de ses opinions dans un but intéressé. Dans ce cas, la « concession » est blâmable, et l’on ne peut que mépriser celui qui l’accorde.


CONCEVOIR. v. a. (du latin : concipere). Donner naissance à un être ; se dit en parlant des femmes et des animaux. « Concevoir dans la douleur ; à partir d’un certain âge, la femme ne peut plus concevoir. »

Dans un autre sens : comprendre facilement ; imaginer. « Concevoir un projet ; concevoir du mépris, de l’amour. » Une condition essentielle pour bien concevoir, c’est de se présenter toujours les choses sous les rapports qui leur sont propres (Condillac).


CONCILE. n. m. (du latin : concilium, assemblée.). Assemblée régulière d’évêques et de docteurs en théologie pour décider des questions de dogme et de discipline. Il y a trois catégories de conciles : les œcuméniques, qui sont présidés par le pape ou par les légats, et auxquels prennent part les évêques catholiques de toutes les nations ; les nationaux et les provinciaux, qui ne réunissent que les représentants ecclésiastiques d’une nation ou d’une province.

Les décisions des évêques, réunis en concile, sont considérées comme émanant de l’Esprit Saint, et c’est ce qui explique cette formule : « Il a semblé bon au Saint Esprit et à nous… » (Actes des Apôtres, XV, 28).

Les plus importants des conciles se sont tenus entre le ive et le xvie siècle et l’influence qu’ils exercèrent fut considérable. C’est en 325 au Concile de Nicée que fut définitivement proclamée la divinité de Jésus Christ. À cette assemblée, Arius, Prêtre d’Alexandrie soutenait contre les théologiens les plus réputés de son époque que le Christ n’était pas Dieu et qu’il n’avait pas toujours existé ; son principal adversaire Saint Athanase soutint la thèse contraire et sortit victorieux. Arius fut solennellement excommunié et c’est sur la dispute de quelques philosophes que, depuis seize siè-

cles, repose la divinité du Christ. Depuis 1549 il ne s’est pas tenu de concile international et il semble que cette attitude de l’Église soit due aux progrès constants de la science auxquels il est difficile d’opposer les lois ridicules et obscures du fanatisme religieux.

L’absence de conciles est un signe des temps et marque un recul de l’Église ; de toute évidence la foi disparait et si les peuples acceptent encore de se courber devant les lois civiles, ils se refusent à la discipline ecclésiastique et ne respectent nullement les règles du droit canon.

Les conciles n’ont donc plus aucune utilité puisque dans le passé on pouvait les considérer comme les États Généraux de l’Église ; et qu’aujourd’hui celle-ci aime mieux s’abstenir de les convoquer que d’avouer ouvertement son impuissance à faire respecter leurs décisions.


CONCILIATION. n. f. Action de rapprocher des personnes séparées par des opinions ou des intérêts différents. « On fait toujours une sottise en rejetant les moyens de conciliation » déclare Rivarol ; cette affirmation est un peu osée. S’il ne faut pas s’obstiner à repousser, lorsque cela est possible, les tentatives d’accord, il est des cas où la conciliation est une concession qui amoindrit l’une des parties.

Lorsque l’on a raison et qu’un adversaire est de mauvaise foi, il est ridicule de vouloir concilier le vice avec la vertu. Nous serions plutôt d’accord avec Massillon qui dit : « que vouloir tout concilier, c’est tout perdre ».

Il est des intérêts qui sont inconciliables ; et du point de vue Anarchiste nous considérons que c’est un crime de vouloir concilier ceux de la bourgeoisie avec ceux de la classe ouvrière. Les hommes qui tentent la conciliation de ces deux contraires commettent une profonde erreur et il est regrettable que la classe ouvrière, ou plutôt une fraction de la classe ouvrière consente à collaborer avec ses exploiteurs dans l’espoir de concilier leurs intérêts communs. Espérons que l’expérience répétée de ces tentatives, et que les échecs successifs qui en résultent ouvriront les yeux de la classe ouvrière et que dans un avenir proche elle saura se libérer des conciliateurs, qui, ne sont trop souvent que des agents conscients ou inconscients du Capital.


CONCLAVE. n. m. Réunion des Cardinaux pour l’élection d’un pape. C’est dans un concile tenu à Rome en 1059, et réunissant cent treize évêques que le privilège d’élire le pape fut déféré aux cardinaux. En 1274 au second concile général de Lyon il fut décidé que : « Le dixième jour qui suit la mort du Pape, et le lendemain de la célébration des obsèques, les cardinaux présents à Rome, après avoir entendu en corps la messe du Saint Esprit, se rendront processionnellement dans le conclave. »

C’est toujours au Vatican que se réunit le conclave et les cardinaux sont, durant toute sa durée, enfermés dans une cellule de laquelle ils ne sortent que lorsqu’un des candidats à la papauté, ayant réuni les deux tiers des voix, est déclaré élu. Avant de voter, chaque cardinal prête ce serment ; je prends à témoin Notre Seigneur Jésus Christ, qui me jugera, que j’élirai celui que je crois devoir élire devant Dieu. » Ce qui n’empêche pas que l’élection d’un pape est plutôt une bataille politique que se livrent les diverses tendances de l’église catholique, et que les intérêts particuliers ne sont pas sans jouer un rôle dans ces élections. Selon les règlements primitifs, à mesure que se prolonge le conclave, la nourriture des cardinaux doit diminuer, ce qui fait qu’au huitième jour elle ne devrait se composer que de pain et de vin ; comme bien on pense ces règlements ne sont pas appliqués.