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Tant qu’un candidat n’a pas réuni le nombre de voix exigé, le vote recommence et les bulletins du vote précédent sont brûlés avec une poignée de paille humide produisant une fumée guettée du dehors par le peuple, qui connaît ainsi les résultats du conclave.

Il arrive que les cardinaux soient longs à se mettre d’accord sur le nom d’un candidat ; lorsqu’il fallut nommer un successeur au pape Clément XIV, les cardinaux se disputèrent pendant près de trois ans.

De nos jours bien qu’entouré du même cérémonial, le conclave n’est qu’un événement d’ordre secondaire et ne présente pas le même intérêt que dans le passé. C’est une comédie qui se perpétue mais la papauté perd chaque jour de son prestige et elle s’éteindra bientôt, ne laissant derrière elle que le souvenir de ses crimes monstrueux et la stupéfaction d’avoir durant des siècles dominé l’Europe.


CONCLUSION. n. f. Fin d’une affaire, d’un livre, d’un exposé, etc., etc… La conclusion de la Paix est l’acte qui met fin aux délibérations entre les belligérants. La conclusion d’un discours.

La conclusion d’un livre, d’un exposé, d’un discours, pour être persuasive doit être une conséquence logique et directe de ce livre, de cet exposé ou de ce discours. Elle doit être une récapitulation du travail présenté, et suffisamment claire, brève et précise, pour laisser à l’auteur ou au lecteur une impression favorable.

Dans le livre comme dans le discours, on doit s’attacher à la conclusion. Un discours sans conclusion est un corps sans âme, une maison sans toit. Certains littérateurs laissent au lecteur le soin de conclure personnellement ; en réalité dans un ouvrage sérieux la conclusion s’impose d’elle-même. C’est différent lorsque au point de vue social on présente au public un sujet quelconque ; il faut conclure sinon on ne produit qu’un travail inachevé et on laisse son auditoire dans l’indécision ; c’est ce qu’il ne faut jamais faire. C’est la faiblesse de quantité de militants de ne savoir terminer un exposé ; cela dénote une lacune car tout homme convaincu et sincère doit pouvoir en tenant compte de ses facultés oratoires ou intellectuelles donner une conclusion aux idées et aux conceptions politiques ou sociales qu’il défend. Si les idées sont claires la conclusion doit être facile ; si elles sont troubles la conclusion présente d’énormes difficultés. Tâchons en conséquence d’avoir toujours des idées claires.


CONCRET. adj. (du latin : concretus, condensé.). Ce qui est « concret » par opposition « abstrait » (Voir abstraction). En chimie les substances « concrètes » sont celles qui sont solides en opposition à celles qui sont fluides. On pourrait donner cette même définition du mot concret lorsqu’il se rapporte aux idées. Une idée concrète est une idée solide qui se rapporte à des substances existant dans la nature, avec les qualités qui leur sont propres.


CONCURRENCE. n. f. Le terme « concurrence » étant employé à la fois par les économistes bourgeois et les individualistes anarchistes, il est de toute nécessité de bien définir ce que ces derniers entendent par « concurrence » ― d’autant plus qu’ils considèrent la liberté de l’exercer comme l’un des principaux facteurs de la sculpture de la personnalité, du développement de l’être individuel.

Pour les bourgeois, pas de doute, ce qu’ils entendent par « concurrence », c’est une course effrénée vers la richesse, c’est l’écrasement, l’annihilation de tout ce qui fait ombrage aux situations acquises ou volées par les gros privilégiés de l’ordre social, par les monopoleurs ou accapareurs d’envergure, dans tous les domaines de l’activité productrice. Il ne s’agit pas, pour eux, d’affir-

mation de la valeur éthique ou créatrice de l’unité individuelle, d’amélioration de l’aspect ou de la qualité du produit, ― mais bien d’un combat, le plus souvent déloyal, entre détenteurs de capitaux-espèces ou outils, entre capitaines d’industrie, combats où vainqueurs et vaincus se servent de l’exploitation des travailleurs pour se livrer bataille. C’est une lutte brutale, farouche, une curée, aucunement un moyen de sélection des plus aptes.

Au point de vue où se situent les individualistes anarchistes, ils font de la concurrence un synonyme d’émulation, de stimulant. Se basant sur la connaissance de la nature humaine en général, de l’être humain, en particulier ― l’être humain tel qu’il est et non pas une créature de rêve ou une chimère livresque ― ils considèrent la concurrence comme un aiguillon destiné à maintenir en éveil constant la pensée et l’activité individuelles, trop ordinairement portées vers l’indolence ou le sommeil.

Mais leur thèse de la concurrence se conçoit, bien entendu, étant inconnues ou abolies la domination de l’homme par l’homme, ou vice-versa.

Par l’expression « liberté de concurrence », les individualistes anarchistes entendent donc la possibilité absolue d’affirmation ou de manifestation de l’individu, dans tous les domaines et dans toutes les circonstances ; autrement dit, la faculté pleine et entière pour tout être humain, associé ou isolé, de présentation, de diffusion, d’expérimentation, de mise en pratique de toutes conceptions, méthodes ― de tous procédés visant ou poursuivant un but analogue ou différent ; ceci, sans avoir a redouter une réglementation ou intervention restrictive ou limitative quelconque s’exerçant au profit d’un État, d’un gouvernement, d’une administration, d’une unité humaine quelconque.

Dans la sphère économique, les individualistes entendent spécialement par « liberté de concurrence » la faculté pleine et entière pour le producteur, associé ou isolé, de déterminer, à son gré, son effort individuel ; c’est-à-dire de mettre en œuvre toutes ses ressources d’ingéniosité et de savoir-faire, de faire appel à toutes ses capacités de création ou d’initiative personnelle ― sans avoir à se heurter à une réglementation qui limite ou restreigne la confection ou les conditions de sa production.

Les individualistes anarchistes revendiquent, pour le consommateur associé ou isolé, la faculté pleine et entière de comparaison, de choix, de refus, aussi bien en ce qui concerne les utilités de première nécessité qui lui sont offertes ou proposées, que les produits de qualité supérieure ou de confection raffinée. Tout cela sans être exposé à être limité, restreint par une réglementation ou une intervention d’aucun ordre, s’exerçant en faveur de qui que ce soit, institution ou personne.

Les individualistes soutiennent cette thèse que toute entrave à cette faculté ou « liberté » a pour résultat d’accroître l’uniformité. Qui dit uniformité, dit stagnation, soit recul, régression, rétrogradation. Dans tout milieu d’où est exclue la concurrence : d’artisan en évolution vers l’artiste, le producteur rétrograde vers le manœuvre, en involution lui-même vers l’automate ― d’appréciateur en évolution vers l’artiste, lui aussi, ou l’amateur, le consommateur involue vers l’absorbeur, le gobeur, le bâffreur.

Dans toutes les sphères de la pensée ou de l’activité humaine, l’absence de concurrence produit l’involution de l’œuvre d’art ou du distinct vers le grossier ou le grégaire, du différencié vers l’aggloméré, du conscient vers l’inconscient.

La preuve évidente de la vérité de la thèse énoncée ci-dessus ne nous est-elle pas fournie par les résultats