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cas de désaveu sont assez fréquents et sont le plus souvent déterminés par l’intérêt, mais parfois le désaveu est déterminé par la tyrannie exercée par les puissants du monde sur leurs sujets. Il y a des cas de désaveu qui sont devenus célèbres. Tel est celui de Galilée, le célèbre astronome du xvie siècle qui déclara que la terre tournait alors qu’en vertu de la doctrine chrétienne toute puissante à cette époque, il fallait soutenir qu’elle était immobile. Galilée fut cité à Rome devant le tribunal de l’Inquisition et sous la menace d’être exécuté, il se rétracta. Il fut contraint de faire abjuration de ses « erreurs » agenouillé, et les mains sur l’évangile.

On raconte qu’en se relevant, il ne put cependant se contenir et prononça tout bas ces mots : E pur si muove (Et pourtant c’est la terre qui se meut). Plus tard, le grand Voltaire, pour échapper aux tracasseries et aux persécutions des autorités, fut également obligé de désavouer plusieurs de ses ouvrages, et même de nos jours, malgré la science et la philosophie qui ont fait de si puissants progrès, on est encore attaché profondément aux préjugés d’hier et des hommes se désavouent pour éviter la souffrance ou l’impopularité.

Certes, quelles que soient les raisons qui déterminent le « désaveu », celui-ci est regrettable, sinon blâmable : mais il faut parfois être indulgent et comprendre que l’homme n’est qu’un homme, et qu’il ne peut pas toujours résister à la tyrannie. C’est en soi-même qu’il faut puiser la force indispensable pour défendre toujours ce que l’on croit être la vérité et en unissant nos efforts lutter contre les erreurs que les puissants du monde ont toujours intérêt à propager.


DÉSERT. n. m. Ce qui est très peu fréquenté, peu peuplé. Une contrée déserte ; une maison déserte.

On a donné le nom de désert aux régions déprimées et soumises à une sécheresse à peu près continue. Il en résulte naturellement pour ces régions une absence presque totale de végétation. Les principaux déserts du monde sont le Sahara, le Kalahari, l’Arabie Pétrée, le Gobi et le Colorado. Le Sahara est fait de dunes de sables et de plateaux pierreux et est parsemé de rares oasis ; il est habité par des Maures, des Touaregs et des Tibous qui sont en grande partie des populations nomades. Il a une longueur de 5.000 kilomètres et une largeur de 1.400 kilomètres environ. C’est le désert par excellence. Les Égyptiens étaient arrivés à en fertiliser certaines parties par irrigation ; mais, depuis l’écroulement de la civilisation égyptienne, la culture y est absolument abandonnée. Le Kalahari, de beaucoup moins important que le Sahara, est un désert de l’Afrique méridionale. Il est couvert d’une végétation buissonneuse et est habité par les Betchouanas, appartenant aux tribus cafres du Sud de l’Afrique. L’Arabie Pétrée est la partie centrale de l’Arabie, et forme un immense plateau pierreux et désert où règnent une chaleur effrayante et une sécheresse absolue. Heureusement pour ce pays que ses côtes sont particulièrement fertiles, et que l’on y récolte en abondance le café, le coton, la canne à sucre, etc., etc.… Le Gobi est un grand désert de la Mongolie qui s’étend entre la Sibérie et la Mandchourie, et son climat est inégal. Quant au Colorado, c’est une contrée de l’Amérique du Nord qui contient d’importantes richesses minérales, mais qui est presque totalement inhabitée.


DÉSERTER. verbe. Action qui consiste à abandonner un parti, une lutte, une bataille. Le mot est employé surtout dans le langage courant, pour qualifier l’acte du militaire qui abandonne sans en avoir obtenu l’autorisation, le poste qui lui a été confié. En période de guerre et dans tous les pays, la désertion devant l’ennemi est punie de la peine de mort ; en temps de paix

les peines sont un peu plus légères, mais la désertion est toujours réprimée avec férocité par les tribunaux militaires. Toute répression est arbitraire et inopérante mais on ne peut concevoir une condamnation plus illogique que celle qui frappe le déserteur. Il y a en effet peu de jeunes gens qui soient attirés par la carrière des armes, en conséquence, c’est par la contrainte qu’on les oblige, dès qu’ils ont atteint un certain âge, d’accomplir une période de service militaire. Comment s’étonner que, parmi eux, il s’en trouve qui, au bout d’un certain temps, abandonnent la caserne pour recouvrer leur liberté ? C’est sans leur volonté qu’on les a embrigadés dans les régiments ; c’est sans tenir compte de leurs opinions, de leurs désirs, de leurs aspirations qu’on les a emprisonnés à la caserne ; ils n’ont rien promis, on ne leur a rien demandé. Est-ce vraiment « déserter » que de se refuser à accomplir un acte, un geste qui nous répugne, que de ne pas se prêter à un travail que l’on juge inutile, à une fonction que l’on estime criminelle ?

Celui qui de sa propre volonté, en pleine possession de ses facultés, conscient de ce qu’il fait, embrasse une carrière et abandonne celle-ci au moment du danger, est méprisable, et, en vertu de la morale et des lois bourgeoises, on comprendrait encore la répression qui s’exercerait contre lui. Mais le malheureux que l’on numérote comme du bétail sans tenir compte de sa personnalité ne peut être blâmable lorsqu’il quitte un poste qu’il n’a pas demandé. Même dans les pays où le service militaire n’est pas obligatoire et où le recrutement est volontaire, le soldat est excusable lorsqu’il déserte. Il est excessivement rare qu’un homme s’engage par amour de l’armée ; très souvent il y est poussé par la misère et la famine ; on fait miroiter à ses yeux le bien-être dont il sera entouré lorsqu’il aura revêtu l’uniforme et ce n’est qu’à l’expérience qu’il se rend compte de son erreur.

Déserter est un crime, lorsque librement on a décidé de participer à une lutte que l’on juge noble et belle, ce n’en est plus un lorsque l’on est entraîné dans une organisation qui est une plaie sociale et qui concourt à la ruine de l’humanité. Il n’appartient cependant à personne de conseiller à un jeune homme de déserter. La désertion n’est du reste qu’un pis-aller et le déserteur un accident ; ce n’est pas cela qui peut transformer la société. La désertion est un geste de révolte individuelle et la société ne peut être transformée que par la révolte collective. Refuser collectivement de se prêter à la sinistre comédie du militarisme peut seul produire des effets. Mais cela suppose un certain degré d’éducation sociale à laquelle les hommes ne sont pas encore arrivés. L’action de déserter, lorsqu’elle est déterminée par des raisons d’ordre social, suppose une énergie et un courage incontestable car le déserteur s’expose à une vie de souffrance et de misère. L’exil est loin d’être une source de joies et l’homme qui accepte cette extrémité se prépare bien des ennuis. De nos jours, les diverses nations du monde s’entendent à merveille sur la question des déserteurs et à la moindre incartade ils sont reconduits à la frontière et livrés à la police de leur propre pays. Il est cependant des jeunes gens qui aiment mieux affronter les risques et les difficultés de la désertion plutôt que de se courber durant un temps déterminé devant les volontés ridicules du militarisme. Il n’y a qu’un remède, un seul, pour se libérer de toutes ces contraintes qui empoisonnent l’existence humaine. Il y aura des déserteurs, tant qu’il y aura des armées et des armées tant que le capitalisme ne sera pas aboli. C’est la cause du mal qu’il faut attaquer si nous voulons en détruire les effets.


DÉSHÉRITÉS (les). « Personnes dépourvues de certains biens que les autres possèdent ». C’est la définition