priété de quelque tuteur. Contre l’un de ses tuteurs, l’État, l’anarchiste a pris nettement position : institution néfaste, il n’y a qu’à le forcer à disparaître au plus vite (voir Anarchisme, État).
Restent les tuteurs naturels, — les parents. Ceux-ci ne sont guère qu’un « mal inévitable » pour l’enfant ; parents par malchance, ils considèrent leurs rejetons comme un fardeau haïssable : la propagande anticonceptionnelle diminue chaque jour le nombre des uns et des autres. Les anarchistes ont toujours été à peu près les seuls à la mener activement, les partis ouvriers la trouvant immorale. En France, elle est actuellement interdite. Un instinct puissant pousse d’ailleurs la plupart des parents à se soucier de l’intérêt de leur progéniture. Au nom de cet intérêt, l’anarchiste va s’adresser à ces derniers. Il leur montrera combien ils vont à l’encontre de leur but, en apprenant à l’enfant à tout sacrifier : fierté, indépendance, à une ambition à la vue courte, la plus grande richesse pour chacun étant de se sentir, soi-même, une valeur.
Aidée par la psychologie, la pédagogie moderne seconde d’ailleurs précieusement les anarchistes dans cette tâche. Depuis Froebel et ses « jardins d’enfants » jusqu’au système Dalton, elle accorde chaque jour plus d’autonomie à l’enfant. En haut lieu, on est peu pressé de mettre en pratique ces dernières acquisitions en matière pédagogique : c’est qu’elles poussent à l’individualisme. Aussi les anarchistes accordent-ils de plus en plus d’attention aux questions touchant l’enfance. — L. Wastiaux.
Bibliographie. Dr Louis Genest : Les maladies des enfants (Drouin, éditeur) ; Dr Pascault : Précis d’alimentation rationnelle (Larousse) ; Bessède : Initiation sexuelle ; Lorulot : La véritable éducation sexuelle ; Ellen Key : Le siècle de l’Enfant et, pour la France : La Laïque contre l’Enfant, de S. Mac Say.
ENFANT n. (lat. infans ; de in, non et fari, parler).
Il est d’usage de diviser la vie humaine en trois périodes : 1o la jeunesse qui comprend l’enfance et l’adolescence ; 2o l’âge mûr ou âge adulte ; 3o la vieillesse.
Autrefois l’enfant était considéré comme un adulte en réduction, un « homonculus », ses tendances particulières, ses manières propres de sentir, d’agir, de penser paraissaient être autant de défauts ou d’erreurs dont il fallait s’empresser de le corriger pour l’amener au plus tôt au degré d’adulte.
Aujourd’hui, seuls des parents plus aimants que clairvoyants, continuent d’admirer les enfants qui singent les grandes personnes et ont, en apparence, des raisonnements d’adultes. Physiologistes et psychologues savent bien que l’enfant n’est pas tout à fait une réduction d’homme bien qu’il ne soit pas absolument différent de ce qu’il sera plus tard, ils le considèrent comme un être qui évolue.
Le développement physique de l’enfant n’est pas uniforme, tantôt la croissance est ralentie ou arrêtée, tantôt elle est accélérée. Les accélérations rapides, crises de croissance, varient avec le sexe, la race, l’état de santé et les conditions sociales. Les enfants des familles pauvres ont un développement physique entravé par des conditions alimentaires et hygiéniques défectueuses.
Les crises de croissance en poids ne correspondent pas aux crises de croissance en taille : l’enfant grandit plus qu’il ne grossit tandis que l’adolescent grossit plus qu’il ne grandit.
La grandeur relative de la tête par rapport à l’ensemble du corps varie d’une façon importante ; proportionnellement le nouveau-né a la tête sept fois plus grosse que l’adulte. La rapidité de la respiration varie
Le nouveau-né est un être à actions réflexes, ces activités peuvent s’exercer sans l’aide du cerveau imparfaitement développé (voir : cerveau, p. 314, 2e col.).
Au point de vue psychologique l’enfant ne diffère pas moins de l’adulte : « l’enfant vit dans le présent ; l’adolescent découvre l’avenir ; l’adulte vit dans l’avenir ; le vieillard vit dans le passé » F. Challaye.
L’enfant est, a-t-on dit, un être sensori-moteur. Les sensations et les mouvements occupent en effet une large place dans la conscience de l’enfant.
Les tendances enfantines, dont la satisfaction produit l’intérêt, naissent les unes après les autres en un ordre constant, elles n’apparaissent ni ne disparaissent subitement mais elles atteignent toujours un point culminant ; c’est ainsi que l’intérêt glossique (au langage) atteint un tel point entre deux et trois ans. De cette prédominance des tendances on a parfois retiré une classification de l’enfance en stades : du suceur, du regardeur, de l’attrapeur, du trotteur, du parlotteur, etc…
En résumé les enfants ne sont pas entièrement différents des adultes mais ne sont pas non plus des réductions d’adultes. Ce sont des êtres qui évoluent suivant une certaine périodicité qui varie sous l’influence de multiples facteurs : les sexes, les individus, etc… Les classifications des âges de l’homme, des stades de l’enfance, de l’évolution des intérêts enfantins s’appliquent à des individus moyens qui n’existent pas en réalité ; elles nous renseignent sur l’évolution de l’espèce mais non sur l’évolution individuelle.
Tous les individus normaux d’un même âge ont des caractères communs : à un âge donné les enfants sont tous aux mêmes stades de leur développement, physique, affectif et mental et les lois de ce développement sont valables pour eux. Mais tous ces individus ont en propre des hérédités congénitales et ont été modifiés par des éducations différentes selon les sujets.
Il en résulte que chaque enfant présente une double évolution, spécifique et individuelle qui fait qu’il ressemble à tout autre enfant et en diffère.
Conséquences pédagogiques. — On sait bien que le développement physique de l’enfant exige qu’il ne soit pas traité comme un petit homme, que par exemple son alimentation doit différer de celle de l’adulte non seulement en quantité mais encore en qualité. Tout n’est certes pas parfait dans le mode d’alimentation et dans l’hygiène des enfants mais cependant on s’en préoccupe et l’on s’empresse de faire venir le médecin si la santé et le développement physique d’un enfant laissent à désirer.
Quelle différence en ce qui concerne le développement intellectuel et moral ! Les mêmes parents qui s’efforçaient de tenir compte du développement physique et de la santé du corps ne s’inquiètent point de ce qui a trait au bon développement intellectuel et affectif. Pour faire de l’enfant un homme on ne sait qu’ordonner et réprimer. Parents et maîtres sont généralement des despotes et l’enfant doit obéir sans discussion. La grande affaire n’est pas de savoir ce qui lui plaît, de connaître ses désirs et ses intérêts, mais de l’obliger à agir selon le bon plaisir des adultes.
Les anarchistes, vraiment conscients, qui ont souffert de l’autorité agissent parfois d’une façon tout à fait opposée à celle de ces parents tyranniques. Certains pensent que pour faire de leurs enfants des individualités libres il convient de les laisser grandir dans la liberté la plus absolue.
Admis d’un côté des éducateurs qui veulent faire des hommes en traitant les enfants comme des esclaves,