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Page:Faure - Encyclopédie anarchiste, tome 3.djvu/27

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MAI
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entre le mot main. Avoir de la main : être adroit, exécuter avec habileté. « La main, dit Reybaud est nécessaire chez le peintre, mais le goût l’est bien davantage. Rien n’est plus aisé que de se gâter la main. » — Large comme la main : de peu d’étendue. — La main de l’homme : son travail. — Les croyants sont courbés sous la main de Dieu : symbole ici de puissance, d’autorité. — On désigne aussi par ce mot l’effet d’influence, la force : la main de la nature, de la destinée : « Il n’y a, a dit E. de Girardin, que la main de la liberté qui puisse dénouer le nœud des nationalités. » Et Voltaire : « La main lente du temps aplanit les montagnes. » — Le gouvernement, la maîtrise : Charles Nodier parle de « la main digne qui brisera le fer de la guillotine. » — La manière de commander : intervenir d’une main ferme, ou légère. — La protection, le soutien, la consolation : essuyer « d’une main secourable » les larmes d’un ami. « Belles petites mains qui fermerez mes yeux » a dit Verlaine. — La possession, la disposition : Les idées sont des fonds qui ne portent intérêt qu’entre les mains du talent. (Rivarol) — Être nu comme la main : dépouillé. — Pas plus que sur la main : manque, pénurie ‒Ne pas y aller de main-morte : frapper rudement. — Biens de mainmorte : appartenant à des gens réunis en communauté, lesquelles, par le renouvellement constant de leurs membres, échappent aux règles ordinaires des mutations de propriété. — Avoir la main légère : ne pas s’appesantir, être habile : Les femmes ont la main plus légère que les hommes pour panser les plaies. — La main leste (ou légère) : être prompt aux coups, au rapt. ‒ La main sûre. Mettre en mains sûres : de confiance, il une personne probe. ‒ Un outil bien à la main : d’un usage commode. — Avoir toujours la bourse à la main : être prompt aux dépenses. ‒ Mettre l’épée à la main : combattre. — Ouvrage de main d’homme : par opposition à ceux de la nature ‒ Main-d’œuvre : voir ce mot. — Y mettre la main : entreprendre, collaborer, participer, et aussi s’immiscer :

Chacun bourdonne autour de l’œuvre politique,
Chacun y veut mettre la main. (A. Barbier).

Mettre la dernière main : achever. Mettre la main à… : apporter son concours. — Travail des mains : occupations, besognes manuelles : « L’homme vraiment utile à la société est celui qui vit du travail de ses mains. » (J. Macé) — Faire par ses mains : soi-même, par ses propres moyens. — Tour de main : tour d’adresse ; se dit aussi d’une action rapide : cela sera fait en un tour de main. — Forcer la main : contraindre. — Main basse : main gauche ; gens de basse main : la lie de la population (deux vieilles locutions). — Faire main-basse : s’emparer. — Avoir les mains crochues : enclines à la rapine. — Tenir la main à quelque chose : y veiller, s’en occuper activement. — On dit aussi : former de ses mains sa destinée, adage qui n’est que partiellement exact. — Prendre de toutes mains : sans s’inquiéter de l’origine. « L’Église est en possession de demander de toutes parts et de prendre de toutes mains. » (Dupin). — Jeu de mains : brutaux. — De main de maître : à la perfection. — Être à toutes mains : apte à toutes les besognes. — Avoir la riposte, la parole en main : être prompt à la réplique, avoir l’élocution facile. — Donner la main : aider. — Prêter les mains à… : condescendre, se faire complice. — Prendre en main une cause : défendre. — Élever les mains vers quelqu’un : implorer. — Ouvrir les mains : se déposséder. — Pousser la main : exercer une pression. — Tenir la main haute : veiller, se montrer exigeant. — L’emporter haut la main : sans peine, avec une avance marquée. — Avoir la main heureuse : avoir de la chance ; les mains nettes : être honnête. — Avoir le cœur sur la main : être généreux. — Mettre la main sur le feu : être convaincu. — Se donner la main : être aussi

filous l’un et l’autre. — Se tenir par la main ou se tenir la main : aller de concert, dépendre l’un de l’autre. « L’ignorance et l’opiniâtreté se tiennent par la main. » (La Rochefoucauld). — Il n’y a que la main : un rien de différence. « D’intendant à fournisseur, il n’y a que la main. » (Balzac) — Avoir les mains longues (on dit plutôt aujourd’hui : le bras) : avoir de l’influence. — Mettre la main à la pâte : besogner. — Sous la main : à portée. — À main (droite ou gauche) : direction. — Des deux mains : avec empressement, etc.

Proverbes : « Froides mains, chaudes amours » (corrélation populaire entre la froideur des mains et le tempérament amoureux). — « Que la main gauche ignore le bien que fait la main droite » (rendez service avec simplicité, sans faire étalage de votre obligeance et n’en tenez pas étroitement registre). — « Dieu regarde les mains pures plutôt que les mains pleines » (un proverbe qui doit faire trembler de multiples « chrétiens » à l’heure de « comparaître »…). — « Un oiseau dans la main vaut mieux que deux dans la haie » (Prov. anglais équivalant à notre « Un tiens vaut mieux que deux tu l’auras » ), etc.

Main (subst.) pap. cahier de 25 feuilles. — Petite main (artis.) : ouvrière sortant d’apprentissage. — Main de roi, main souveraine (droit ancien) : souveraineté. — Main de justice : autorité judiciaire : un emblème portait aussi ce nom ; on disait aussi main pleine, main moyenne, etc. — Main bote (pathol.) : difformité palmaire ou dorsale. — Main de gloire, main de Fatma, etc. : amulettes, objets de superstition. — Main de fer (mar.) : poignée avec crochet d’abordage. — Main courante (escalier) : partie supérieure de la rampe sur laquelle glisse la main. — Main du diable (zool.) : nom vulgaire de divers corollaires-alcyons, etc. ‒ Lanarque.


MAIN-D’ŒUVRE. n. f. Nous n’examinerons ici que la main-d’œuvre telle que ses conditions, son utilisation, sa valeur et les conséquences de son estimation se posent dans le régime actuel de la production. Nous laisserons à ce dernier mot, ainsi qu’à travail et autres mots connexes, l’étude de la contribution du travail dans l’avenir ‒ de la main-d’œuvre dans son sens élargi ‒ et du rythme prévu de sa participation en vue du rendement nécessaire à une production équilibrée.

Le Larousse donne cette définition de main-d’œuvre : « Travail des ouvriers dans la confection d’un ouvrage. » « Le prix de main-d’œuvre, joint à celui des matières premières, établit la valeur intrinsèque d’un objet manufacturé » (Lenormant) ‒ Prix payé pour le travail dans un ouvrage quelconque. (Pluriel : des mains-d’œuvre) ‒ Encycl. (Econ. polit.) : « La main-d’œuvre est le travail de l’homme appliqué à la production ou à la transformation des choses ; extrêmement variable quant à son prix, elle est un des éléments de la valeur définitive des fabrications, des constructions, des cultures, etc. » ‒ La question de main-d’œuvre est complexe ; deux intérêts parallèles tendent constamment à son abaissement : celui de l’entrepreneur, qui bénéficie de l’écart entre le prix de revient (où la main-d’œuvre joue le plus souvent le rôle principal) et le prix de vente ; celui du consommateur (naturellement intéressé à acheter au tarif le plus bas), lequel, la concurrence aidant, fait baisser proportionnellement le prix de vente. Mais un intérêt antagoniste des deux précédents tend au contraire, à faire hausser le prix de la main-d’œuvre, c’est l’intérêt de l’ouvrier. Dans cette lutte inégale entre l’ouvrier et l’entrepreneur, (celui-ci représentant ‒ après lui-même ‒ le consommateur), la victoire n’appartient presque jamais à l’ouvrier.

L’entrepreneur doit peser deux facteurs : son bénéfice personnel dans l’œuvre en cours et la satisfaction