Page:Faure - Encyclopédie anarchiste, tome 4.2.djvu/354

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
VEG
2852

vitamines, la cellulose et l’eau. Elle permet l’individualisation d’un régime. Dans une collectivité, connue par exemple une colonie libre ou un foyer végétalien, chacun étant son propre cuisinier, peut choisir pour la confection de sa salade mixte les éléments qui lui plaisent ou qui sont favorables à sa santé ou pour satisfaire à l’exigence de l’adaptation progressive à un régime nouveau. Au point de vue pédagogique, quel merveilleux centre d’intérêt que la confection d’une Basconnaise : elle éveille la curiosité de l’enfant et l’initie aux sciences physiques et naturelles.

Le régime végétalien a aujourd’hui de nombreux adeptes. Les foyers végétaliens servent journellement des centaines de repas. Le premier foyer, 40, rue Mathis, en plein quartier de la Villette, fut fondé par G. Butaud en 1924. Bientôt, grâce à l’initiative de J. Demarquette, d’autres foyers surgirent (La Source, Pythagore) ; ces derniers, avec le succès, ont perdu leur pureté théorique du début, mais ils avaient pris naissance avec le titre de foyers végétaliens. La Basconnaise est servie dans de nombreux restaurants végétariens, quelquefois appelée autrement : « hors-d’œuvre en salade », « salade composite », etc… Rimbault et son école, à Luynes (près de Tours), font une active propagande autour d’une Basconnaise « d’infinie variété » tendant à la panacée. Il présente son invention à la lumière de théories originales, mais souvent outrancières. Phusis ( « La chute de l’Humanité », « Rajeunir » ) nous conseille, sans sourire, de nous nourrir de l’azote de l’air, de kakis et de salades blanchies, jaunies dans la cave. À ce compte, paraît-il, entre autres miracles, l’émail des dents se refait.

Plus modestes et plus sobres en promesses sont quelques documents publiés par Le Végétalien, 131, rue Saint-Gratien, Ermont (S, —et-O.). (L’Individualisme conduit au Robinsonisme ; Le Végétalisme permet le Communisme, par G. Butaud ; Victor Lorenc et sa contribution. au Naturisme, par S. Zaikowska ; Résumé de la doctrine, G. Butaud, V. Lorenc et Jean Laboulais, et sa critique, par le Dr Hemmerdinger). — Crudivégétalisme (G. Butaud) ; Réponse à l’enquête sur le Végétalisme (V. Lorenc) ; Sucre industriel ou plante sucrée ? (V. Lorenc). — Aux Editions Maloine : Les Poisons Overtaniens (V. Lorenc et J. Laboulais), etc…

Un travail sérieux a été fait par la Société Naturiste Française (48, rue Piard, à Brévannes, S.-et-O.) en éditant la série de nombreux ouvrages du Dr Carton, dans lesquels nous avons puisé souvent. (Traité d’alimentation, Les trois aliments meurtriers, Enseignements naturistes, etc…)

Le Dr Carton nous recommande de procéder avec prudence, car l’homme qui a l’appareil digestif du singe crudivégétalien n’ayant jamais pu s’adapter à l’aliment cadavérique de la Hyène, offert par la civilisation, a souvent la santé si délabrée que son organisme ne peut plus faire les frais d’une nouvelle adaptation vers le régime ancestral, le régime crudivégétalien. — Sophie Zaïkowska.


VÉGÉTARIEN n. m. De l’adjectif latin vegetus qui signifie végéter, dont on a fait le synonyme de vigoureux en raison de ce que le mot végéter, pris dans son sens littéral, exprime tout ce qui croit normalement, par conséquent vigoureusement. — Celui qui pratique le végétarisme.


VÉGÉTARISME n. m. Système d’alimentation excluant tout ce qui est de nature à compromettre l’équilibre physiologico-mental et, par voie de conséquence, la vigueur de l’homme. Ainsi, la viande, les poissons, les spiritueux, les boissons fermentées (improprement dénommées hygiéniques), le chocolat, le café, etc., etc. Préconisé en mode préventif et curatif dans le traitement des maladies.

Ce concept diététique, loin de réunir tous les suffrages, a divisé le monde savant en deux clans antagonistes. Au sein même de la Faculté de Médecine, où certains membres éminents ont introduit ce brandon de discorde, règne semblable division.

Il semblerait cependant, a priori, que le monde médical, particulièrement qualifié pour trancher ce différend dans un sens non équivoque ait abouti à une solution définitive du problème. Il n’en est rien et, pendant que maints fils d’Esculape convient les foules à l’initiation végétarienne, d’autres prêchent, à son égard, une sévère mise en garde. Il convient donc de soumettre au lecteur la copieuse documentation, constituée aujourd’hui, de nature à éclairer ce passionnant sujet.

Une question préalable se pose : A quelle catégorie l’homme appartient-il ? Convient-il de le ranger parmi les carnassiers ou parmi les omnivores ? Devons-nous l’assimiler aux herbivores ou bien, imitant Cuvier, Flourens, Linné, et une foule d’anthropologistes, l’apparenterons-nous à la famille des frugivores-types, représentée par les anthropoïdes ?

Il semblerait, de prime abord, que cette question fût insoluble tant les mœurs alimentaires des multitudes humaines sont divergentes et contradictoires. Elle apparaît beaucoup plus simple si nous faisons intervenir la paléontologie, la palethnologie, l’ethnologie, l’anatomie et la physiologie comparées, l’analyse chimique et biochimique, la toxicologie, la statistique, etc…

Grâce il la science des comparaisons anatomico-physiologiques, nous savons aujourd’hui que, en raison des lois de l’adaptation, tous les êtres, et particulièrement ceux qui ont atteint les cimes de la hiérarchie généalogique, ont acquis une organisation digestive parfaitement caractérisée : denture, estomac, intestin, foie, ont abouti à une structure histologique et morphologique spécifiques, à une aptitude métabolique adéquate. C’est donc cette admirable pierre de touche que nous allons faire intervenir aux fins d’élucider ce point énigmatique.

Derechef, posons-nous donc cette question : A quelle classe appartient l’homme ? Son maxillaire s’orne-t-il de canines aiguës et démesurées, aptes à saisir une proie ; de molaires acérées, capables de sectionner la chair de ses victimes et de déchiqueter ses os, à l’instar des grands carnassiers (lions, tigres, loups, chiens), ou des omnivores, tels que l’ours, le porc, etc… ? Ou bien dispose-t-il de larges molaires aplaties, véritables meules destinées à broyer la cellulose rebelle des herbes coriaces, comme c’est le cas des herbivores ?

Bien au contraire, semblable aux frugivores, représentés par l’orang-outang, le chimpanzé, le gibbon, sa mâchoire ne possède que de pseudo canines émergeant à peine des autres dents et ses molaires et prémolaires de forme cylindrique sont pourvues, sur le pourtour de la couronne, de petits mamelons propres à favoriser la mastication des fruits sauvages, grains, bourgeons, racines. Le gorille offre cependant une exception à cette règle. Quoiqu’étant, ainsi que le souligne M. de Mortillet, le plus herbivore du groupe, une double paire de formidables canines semble le l’approcher des grands fauves. Darwin a donné une explication plausible de cette apparente anomalie dentaire. Ces organes constituent pour ce grand simien, des armes redoutables, offensives et défensives. Quant à ses molaires, elles sont absolument comparables à celles de ses congénères précités. C’est donc seulement à cette dernière variété de dents que doit être conféré le caractère de critérium, en matière de classification zoologique, puisque le chameau, lui-même herbivore avéré, est nanti aussi de canines démesurées.

Notons également que le maxillaire inférieur de l’homme, semblable à celui des autres frugivores ainsi que des herbivores, est susceptible de mouvemente oscillants aussi bien sur le plan horizontal que dans