Page:Femmes-poëtes de la France, éd. Blanvalet, 1856.djvu/190

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Ne murmurant jamais, tant son âme était haute,
N’ayant que Dieu pour juge en ses muets combats,
Et voilant son malheur comme on voile une faute,
Souffrant de ces douleurs qui ne se plaignent pas ;

Vivant dans ses longs jours isolée et sans guide,
Et voyant chacun d’eux, fatalement pareil,
Sans espoir, sans bonheur, triste, uniforme, vide
Comme un morne horizon sans pluie et sans soleil.

Et quand le poids des ans eut incliné sa tête,
Son cœur, tant éprouvé par un destin jaloux,
Se vengea noblement de sa part incomplète ;
Elle agrandit sa vie en la donnant à tous.

Saintement résignée à marcher solitaire,
Sans époux, sans enfants, sans lien, sans amours
De tous les affligés elle devint la mère ;
Doux nom qu’avaient souvent rêvé ses mauvais jours !

Gloire, gloire à celui qui garde dans son âme
La foi, divin trésor d’intarissable miel !
Toi qui n’as partagé que les maux de la femme,
Ô vierge en cheveux blancs, va confiante au ciel !