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FABLES.

jours il ne lui donnait la princesse ; car il était ogre. Cela inquiéta la reine, qui découvrit tout au roi. On envoya quérir la fée, qui rendit à la princesse sa première forme. Cependant il arriva un prince qui outre sa bouche naturelle, en avait une au bout de chaque doigt de la main. Le roi aurait bien voulu lui donner sa fille ; mais il craignait le monstre. Le prince, qui était devenu amoureux de la princesse, résolut de se battre contre l’ogre. Le roi n’y consentit qu’avec beaucoup de peine. On prit le jour : lorsqu’il fut arrivé, les champions s’avancèrent dans le lieu du combat. Tout le monde faisait des vœux pour le prince ; mais, à voir le géant si terrible, on tremblait de peur pour le prince. Le monstre portait une massue de chêne, dont il déchargea un coup sur Aglaor ; car c’était ainsi que se nommait le prince : mais Aglaor ayant évité le coup, lui coupa le jarret de son épée, et l’ayant fait tomber, lui ôta la vie. Tout le monde cria victoire ; et le prince Aglaor épousa la princesse, avec d’autant plus de contentement qu’il l’avait délivrée d’un rival aussi terrible qu’incommode.





IV. Histoire de Florise.




Une paysanne connaissait dans son voisinage une fée. Elle la pria de venir à une de ses couches, où elle eut une fille. La fée prit d’abord l’enfant entre ses bras, et dit à la mère : Choisissez ; elle sera, si vous voulez, belle comme le jour, d’un esprit encore plus charmant que sa beauté, et reine d’un grand royaume, mais malheureuse ; ou bien elle sera laide et paysanne comme vous, mais contente dans sa condition. La paysanne choisit d’abord pour cet enfant la beauté et l’esprit avec une couronne, au hasard de quelque malheur. Voilà la petite fille dont la beauté commence déjà à effacer toutes celles qu’on avait jamais vues. Son esprit était doux, poli, insinuant ; elle apprenait tout ce qu’on voulait lui apprendre, et le savait bientôt