Page:Ferdinand Buisson - Sébastien Castellion - Tome 1.djvu/222

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204 — SEBASTIEN citsranmow. mots à double sens, je n’ai pu discerner si c`était en riant qu’il disait ce qu’il m’a dit. Quant a Sébastien, je désire, comme je vous l’ai dit, que nous trou- vions un moyen de lui assurer une situation. J’_y aiderai de tout mou pouvoir. Croyez-moi, je suis extraordinairement tourmenté par la per- spective du sort qui le menace. Episcopus, son successeur·*, sera iici a Pâques 2. Chez [l’imprimeur] Jean Girard, il ne doit pas attendre un gros salaire, a moins de se tuer de travail. Mais vous, de votre coté, cherchez bien si vous ne pourriez pas trouver un moyen de lui être utile. Je sais bien qu’il s’est mis dans l’esprit que j`ai le désirde dominer. Est—ce ai tort ou a raison qu’il a cette opinion sur moi? Au Seigneur . d’en_juger. Pour moi du moins,je ne crois pas y avoir donné lieu, tandis que lui m’a obligé a le juger ambitieux et chercheur de difficultés; mais ‘ je tiens compte de son savoir et de son caractere, qui, autrement, r'eSt pas mauvais 3. La situation de Calvin a Geneve au printemps de 4544 se dessinait plus nettement. Il avait organisé l’Église; de plus il avait pris role non pas de dictateur ni même de législateur, mais de premier conseiller du gouvernement dans toutes les affaires publiques, temporelles et spirituelles, politiques, militai1·es, diplomatiques. C’était it son influence qu’etait due l’heureuse solution du conflit pendant avec Berne depuis tant d’années. Les débris du parti des articulants obtenaient une amnistie qui prouvait qu`ils 11`étaient plus ât craindre. La ville, au milieu des guerres entre l’Empereur et le roi F rançois I", chercliait a tirer» avantage de la position, it se mettre ai l’abri de toute surprise. Aucune de ces négociations ne s’eng·age sans l’avis de Calvin. . Mais cette extension même de son influence devait pro- voquer les susceptibilités des vieux Genevois. Le seul fait de cette toute-puissance morale conférée ai un étranger, qui, sans fonction civile, inspirait presque tout dans l’Etat, eut suffi a justifier plus d’un propos malséant, plus d’un mou- vement (l7l1UIl]0ll|‘ ou d’envie. Le caractere de l,l1OIll1ïlC y devait encore ajouter. Ce théo- logien de trente—quat1·e ans domine de toute la hauteur de son g·énie et de toute l’énerg·ie d’une volonté inflexible ceux . 1. Qui était ce personnage? Sans doute un nommé Levêqne, qui du reste nous est Il'lCOlll1U· 2. Pâques tombait cette année le 13 avril. ' 3. Traduction du texte latin publié dans Opp. Calc., XI, (Di.