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FABLE CXIV.

L’AGNEAU ET LE LOUP.


Messire loup enlevoit un agneau
Et le portoit dans sa tanière,
On croit bien que c’étoit le plus fort du troupeau ;
Se débattant de peur et presque de colère,
Enfin se dégageant de la dent meurtrière,
L’agneau crioit : M’arracher à ma mère !
Contre nous appaisez votre injuste courroux !
Qu’avons-nous fait pour vous déplaire ?  :
Vous êtes l’animal le plus cruel de tous.
Tu ne connois donc pas celui qu’on appelle homme,
Repart le loup en le flairant ?
Il fait la guerre à tout être vivant,
Et même à ses pareils ; il fusille, il assomme,
Et bien souvent sans la moindre raison.
Je tuerai par fois un mouton,
Mais point de loup : tuer son frère est crime énorme :
Pour celui-là chez nous il n’est point de pardon.
Ton maître auroit déjà fini ta doléance,
Car du monde bientôt il te falloit sortir
Je te mangerai cru, lui t’auroit fait rôtir,
Et voilà de ton sort toute la différence.