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Qu’ils sont ingrats ! Ils vont quitter leur mère ;
Dans quelques jours un peu plus grands,
Ils oublîront les soins de leurs tendres parens ;
À quoi sert à ceux-ci d’avoir progéniture ?
L’ingratitude, hélas ! est donc dans la nature ?
Mais, dit l’autre vieillard ? chez tous les animaux
On agit comme ces oiseaux ;
L’un va chercher sa nourriture,
L’autre suit un mari, l’autre guette un amant.
Chacun y fuit les vieux en grandissant ;
Plaisir de liberté c’est tout ce que l’on aime.
Votre humeur sur ce point semble hors de saison :
Bien souvent parmi nous n’en fait-on pas de même ?
Et l’on vante pourtant son cœur et sa raison.
— Ah ! voilà le sujet de ma tristesse extrême :
Je suis père et faisois cette comparaison.



FABLE CLIII.

LA VACHE ET LE MULET.


Depuis du temps, seule en bon pâturage,
Une vache paissoit tranquille dans son coin ;
Un mulet quelquefois traversoit ce pacage :
Et pourquoi des troupeaux êtes-vous donc si loin,
Lui disoit-il un jour ? C’est une triste vie
D’être matin et soir sans nulle compagnie.
— Non, je connois le monde et sais bien m’en passer ;
Si tu le vois souvent tu pourras t’en lasser.
De ce troupeau nombreux rien ne sauroit me plaire :
Le cheval est fier, dédaigneux ;
Tous les moutons sont ennuyeux ;
L’âne est sot, et ne sait que braire