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Conseillez-moi, vous discrète, et prudente.
Ne puis-je aller habiter les états
Du lion, le plus fier de tous les potentats ;
Enfin, sortir de la route commune ?
Je connoîtrois la cour, tigres, loups, léopards ;
Avec eux je pourrois affronter les hasards,
Ensuite partager avec vous ma fortune.
Quoi ! tu ne sais donc pas, dit-elle, que ces grands
Des autres animaux ne sont que les tyrans ?
Oui, la gloire de ces méchans,
Aux bons, est toujours importune.
Et d’ailleurs, sans adresse, et sans un protecteur
Tu ne pourras jamais être un heureux voleur.
Paresse, bonhomie, et douceur et droiture,
Mon enfant, voilà notre lot ;
Et c’est encor le meilleur, je t’assure :
Un âne ambitieux doit passer pour un sot.
Cache donc tes projets, mon cher, je t’en conjure.
Et puis, dis-moi, chétive créature,
Si nous autres petits devenions des brigands,
Où seroient les honnêtes gens ?



FABLE XII.

LE LIS, LA ROSE ET LE TILLEUL.


Deux fleurs, l’autre matin, disputoient de beauté.
Le lis de sa blancheur faisoit grand étalage ;
Et la rose, avec vanité,
Disoit qu’à son éclat tout devoit rendre hommage :
À l’entendre, elle étoit le chef-d’œuvre des dieux.
Pour le lis, se croyant l’ornement de la terre,