Page:Ferrandière - Œuvres, 1816.pdf/42

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
(34)

Pour parvenir à cet éclat suprême ;
Laisse-moi vivre infortuné.
On m’offriroit tous les trésors en somme
Pour devenir muphti, favori, grand visir,
Je dirois non ; car mon désir
Est de rester un honnête homme ;
Et quant au rang de souverain seigneur,
Je n’en voudrois pas davantage :
Nos potentats ont toujours peur.
Je pourrois des humains commencer le bonheur ;
Mais aurois-je le temps de finir mon ouvrage,
Dans ce climat où l’homme est rebelle, inconstant ?
Il n’est qu’un insensé qui désire ardemment
De posséder une couronne.
Qu’il ne porte, hélas ! qu’en tremblant,
Et qu’enfin un caprice ôte, ainsi qu’il la donne.
Ne m’afflige donc plus par l’offre de bienfaits
Que je n’accepterai jamais.
Je ne voudrois qu’une simple chaumière,
Un petit bois et quelques champs,
Tendre femme et jolis enfans,
Honnêtes gens ;
Et, pour me rendre heureux jusqu’à ma dernière heure,
Ô Mahomet ! garantis ma demeure,
Non des voleurs, car je n’ai point d’argent,
Mais de l’impie et du méchant.
L’objet de tous ses vœux fut bientôt son partage ;
D’un cœur reconnoissant le dévot l’accepta ;
Et Mahomet, sur son nuage,
À son paradis remonta,
En s’écriant : Enfin, je viens de voir un sage !