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Et je ne pourrois qu’en gémir.
Ce n’est pas tout, car vous feriez bombance
Des pauvres innocens que j’aurois vus mourir,
Et j’entendrois vanter votre affreuse abondance.
   — Que t’importe que nous mangïons
Des racines ou des moutons ?
Tu nous laisseras vivre à notre fantaisie ;
Conserve ta philosophie,
Sans critiquer notre régal ;
Pourvu qu’on épargne ta vie,
Tout le reste doit t’être égal.
Non, dit-elle, jamais je ne serai des vôtres ;
J’aime mieux mon chétif repas :
Mal évité pour soi ne suffit pas,
Il faut encor n’en pas voir faire aux autres,



FABLE XXXII.

LE SINGE À LA COUR DU ROI.


En imitant tout ce qu’il voyoit faire,
Un singe avoit acquis grand nombre de talens ;
Il savoit tours de force et tours de gibecière,
Faisoit mille sauts différents,
Même écrivoit à sa manière.
Élevé dès l’enfance en très-bonne maison,
Mais se lassant de l’esclavage,
Ayant brisé sa chaîne, il quitta sa prison,
Regagna les forêts, puis un antre sauvage
Où résidoit un vieux lion,
Souverain absolu de ce vaste canton.
Il paroît à sa cour, y plaît par son adresse,
Par son esprit, sa gaîté, sa souplesse ;