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L’ESSENCE DU CHRISTIANISME

sauvés et qu’ils entrent dans la vie éternelle (Saint Jean, III, 16). » — « Chaque esprit qui reconnaît que Jésus le Christ est entré dans la chair, vient de Dieu, mais chaque esprit qui ne le reconnaît pas, ne vient pas de Dieu, c’est l’esprit de l’Antichrist (Saint Jean, 4, 1). » — « Un menteur nie que Jésus soit le Christ c’est l’Antichrist, il nie le Père et le Fils (Saint Jean, I, 2, 22). » — « Qui devient apostat et déserteur, au lieu de rester dans la doctrine du Christ, celui-là n’a aucun Dieu ; mais qui reste dans la doctrine aura le Père et le Fils. Si quelqu’un vient chez vous sans confesser cette doctrine, ne le recevez pas, ne le saluez pas. Quand on le saluerait, on se rendrait coupable de ses mauvaises œuvres (Saint Jean, II, 9). » Veuillez remarquer que c’est l’apôtre saint Jean qui parle, surnommé l’apôtre de l’amour extatique ; cet amour est exclusif, c’est-à-dire, il n’embrasse que les membres de la communauté chrétienne : « Dieu est le sauveur de tous les hommes, principalement des croyants (Timoth., I, 4, 10) ; » le mot principalement est très significatif : « Faisons du bien à tout le monde, mais surtout à nos frères dans la foi (Épit. aux Galat., 6, 10) ; » le mot surtout est encore significatif. — « Évitez l’hérétique, quand il a été exhorté et admonesté une fois et encore une fois : cet homme-là est pervers, il a péché, il s’est condamné lui-même (Tit. 3, 10) de là découle sans difficulté le sentiment haineux que Cyprien (Epistol. 74) prononce dans les mots suivants : « Si vero ubique haeretici nihil aliud quam adversarii et Antichristi nominantur, si vitandi et perversi et a semetipsis damnati pronuntiantur, quale est ut videantur damnandi a nobis non esse, quos constat apostolica contestatione a semetipsis damnatos esse ? » Cyprien a raison : l’apôtre insiste fortement sur la perversité des hérétiques, l’apôtre ne se trompe pas, puisque Dieu l’inspire, donc nous devons imiter l’apôtre ; or, l’apôtre dit que les hérétiques se sont condamnés eux-mêmes d’avance : donc — etc. Tout cela est d’une clarté et d’une logique effrayante, et forme autant d’anneaux d’une chaîne qui peu à peu étreint l’intelligence et le cœur, et qui finit par les étouffer.

« Celui qui croit au Fils possède la vie éternelle ; qui ne croit pas au Fils, celui-là ne verra point la vie éternelle et la colère de Dieu planera sur lui (Saint Jean, III, 36). » Le passage dans saint Luc, IX, 56, auquel on cite comme parallèle saint Jean, III, 17, se