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LE MARÉCHAL DE MONTLUC.

Des liens si étroits ne pouvaient manquer de créer entre le capitaine et les soldats un attachement réciproque, et l’on comprend quelle force y puisait Montluc, traînant toujours à sa suite des compagnons non moins déterminés que lui-même. Mais fallait-il manier et gouverner leurs esprits, il trouvait en lui, comme il s’en applaudit, « le don de Dieu, encore qu’il ne fût pas grand clerc, de se savoir bien exprimer quand il en avait besoin. » En réalité, il avait le don spontané de cette éloquence militaire qui réside dans les mouvements, les gestes, l’accent autant que dans la parole. Et la persuasion n’était pas le seul moyen dont il usât pour mener ses gens à la victoire. Malheur à qui d’entre eux eût lâché pied devant l’ennemi ; car il s’est montré, « encourageant les uns et menaçant les autres, avec l’épée nue au poing, pour faire quelques mauvais coups, s’il eût vu des poltrons. » C’est assez dire que la discipline dans sa troupe était aussi exacte que sévère ; car il y voyait le plus sûr garant du succès, en même temps que l’obéissance était ennoblie par cette considération, que seule elle rendait digne de commander. Selon lui, « il n’y a rien de plus pernicieux en une campagne que les mutins. » Ils n’avaient donc aucun droit à l’indulgence. Toutefois Montluc recommande de ne pas châtier les soldats sans juste raison ; mais de distribuer avec équité le blâme et les peines autant que l’éloge et les récompenses. Ainsi se fût-il flatté « de faire donner à ses hommes de la tête contre une muraille. » Que le chef, par un discernement nécessaire et que Montluc possédait au plus haut degré,