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LE MARÉCHAL DE MONTLUC.

tions les plus odieuses, jusqu’à être accusé de ruiner la Guyenne par ses exactions et de vouloir même la livrer à l’ennemi. Ces calomnies, à force d’être répétées, ne laissèrent pas, selon lui, de trouver en haut lieu quelque créance. Et on peut croire d’ailleurs que, peu mesuré dans ses propos, il était, par son caractère si tranché, prompt à envenimer les mécontentements et les haines. C’est ainsi qu’il excita l’inimitié de deux puissantes maisons, celles de Chàtillon et de Montmorency. On voit surtout qu’il eut beaucoup à souffrir de la conduite et des procédés du duc de Damville, le fils du connétable de Montmorency et qui était maréchal de France. Il s’est plaint au reste fréquemment d’avoir été desservi par ceux qui entouraient le roi, pour n’avoir voulu dépendre d’aucun autre que de lui, et il se consolait de ses disgrâces privées par cette réflexion : a qu’on ne peut vivre en ce monde sans acquérir des ennemis. » Montluc recherchait la faveur, et quand elle lui échappait, il n’était pas homme à le supporter en silence ; car l’abnégation n’était pas sa principale vertu. À ses yeux, le roi est la source des faveurs et de tous les biens, dont ce pauvre gentilhomme, » comme il se dit souvent, il ne fait pas fi ; tout au contraire. Là-dessus il exprime naïvement sa pensée : « Qui se veut chauffer, il faut qu’il s’approche du feu ou du soleil. Notre soleil, c’est le roi, qui nous éclaira et échauffe de ses rayons, quelque part que nous soyons. » Montluc sert donc avec plus d’ardeur que de désintéressement, et pour tout dire en un mot, d’un caractère peu chevaleresque, il n’a