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MARIE DE ROMIEU

bileté ni de feu. Mais ce n’est pas seulement inspirée par une cause qui lui est personnelle, et sur cette question souvent débattue vers la même époque par des plumes érudites ou piquantes, qu’elle a fait preuve de talent poétique. Dans les œuvres de Marie de Romieu, que son frère publia en 1581 et, s’il faut le croire, à l’insu de l’auteur, percent des germes heureux développés par l’étude. On y trouve un mélange, alors habituel, d’églogues, d’élégies, d’odes, de sonnets et d’hymnes, où nous choisirons, pour la citer, une imitation de la pièce d’Anacréon sur la rose ; dans ce sujet Marie de Romieu, par une de ces innocentes luttes qui plaisaient aux beaux esprits du seizième siècle, n’avait pas craint de rivaliser avec Belleau, Ronsard, Baïf et du Bellay :


Au dedans d’un jardin s’il y a rien de beau,
C’est la rose cueillie au temps du renouveau :
L’Aube a les doigts rosins ; de roses est la couche
De la belle Vénus, et teinte en est sa bouche ;
En Paphos, sa maison est remplie toujours
De la suave odeur des roses, fleur d’amour.

La rose est l’ornement du chef des damoiselles,
La rose est le joyau des plus simples pucelles ;
De roses est semé des Charites[1] le sein,
Et de leur doux parfum le ciel lui-même est plein.
Bacchus, ce deux fois né, ce Bassar[2] vénérable,
De roses et de vin garnit toujours sa table.

  1. Les Grâces : c’est leur nom grec.
  2. Un des surnoms grecs et latins de Bacchus : nouvelle trace du savoir classique de la renaissance.