Page:Fiel - Épreuves maternelles, 1930.djvu/101

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
99
ÉPREUVES MATERNELLES

— Non, répondit doucement Denise, je préfère rester à Paris.

— Cette dame voulait donc me remplacer ? Ben, je lui souhaite du courage… Madame ne cesse de grogner, les garçons sont des monstres avec qui je me bats sans arrêt, et la petite est difficile comme pas une.

Denise en avait assez entendu pour ne pas désirer entrer dans cette maison.

— Allez dans un bureau de placement, lui conseilla la bonne. Là, vous trouverez à votre goût.

Denise remercia et sortit. Elle pensa à la boulangère serviable, mais ne voulut pas l’informer de sa situation. Elle craignait de lui donner de la méfiance. Cependant la nécessité la harcelait et elle jugeait indispensable de se placer au plus tôt.

Tout son être était tendu vers le gain immédiat, vers l’abri qu’il lui fallait à tout prix afin de se sauver de ces courses incertaines.

Elle se rendit dans un bureau de placement.

Maintenant l’âme fortifiée de Denise ne considérait plus avec autant d’amertume sa déchéance. Elle levait les yeux toujours plus haut et elle pensait à son frère qui assumait les besognes les plus ingrates et les plus viles pour plaire à Dieu, et pour aider ses frères à gagner le ciel.

Elle pensa plus fortement encore à lui lorsqu’elle s’assit au milieu des domestiques, en quête de place, femmes aux toilettes disparates.

S’il y avait des servantes modestes, habillées selon leur condition, il s’y trouvait aussi celles qui voulaient être à la mode et qui se paraient de souliers à hauts talons et de robes à tons criards.

On lui demanda son nom.

— Bon, quand j’aurai quelque chose pour vous, je vous ferai signe.

— Je suis très pressée.

— Il faut de la patience, mais vous n’attendrez pas longtemps, on est assailli de demandes, je crois que vous plairez, parce que vous n’êtes pas à falbalas.

Ceci, lancé à l’adresse des demoiselles à robes voyantes, provoqua quelques murmures, mais la patronne du bureau n’en prit nul souci.

Denise allait se retirer, quand une dame entra. Elle