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ÉPREUVES MATERNELLES

blée, intervint Mme Pamadol en riant.

— Ce serait à le croire !

— Je me demanderais pourquoi ?

M. Rougeard ayant entamé une discussion qui lui plaisait davantage, la personnalité de la servante fut délaissée.

Une telle joie enserrait Denise qu’elle se retenait pour ne pas la crier tout haut. Elle comprimait les battements de son cœur, elle arpentait sa cuisine, ne sachant plus ce qu’elle faisait.

« Je les reverrai ! murmurait-elle, je les reverrai ! »

Elle ne pensait pas que cela pouvait être une feinte de son mari. Elle oubliait les souvenirs mauvais et croyait à la récompense gagnée. Le temps de douleur était passé.

Ces trois mots l’enivraient, la jetaient dans un monde de joies et de délices. Elle oubliait ses peines, ses chagrins, ses souffrances. Paul Domanet la regrettait et il lui rendrait ses enfants quand le laps de temps utile à son repos serait écoulé, selon la fable donnée.

Elle joignait les mains pour remercier Dieu ; elle croisait les bras pour contenir l’enchantement qui lui semblait déborder de son être.

Ainsi, elle les reverrait ! Leurs chers petits bras se tendraient vers elle et de nouveau, elle serait leur recours et leur vie.

Son mari avait enfin compris qu’on ne pouvait séparer une mère de ses enfants, surtout une mère dont la source des jours ne s’alimentaient que de leur présence.

Elle murmurait leurs noms. Ils glissaient sur ses lèvres comme une caresse et elle ne se lassait pas de les répéter.

Elle négligeait totalement ses devoirs de servante, et s’enfonçait dans son rêve. Elle en fût réveillée brusquement en entendant la sonnerie qui l’appelait dans la salle à manger.

Elle ne put dissimuler entièrement le rayonnement qui s’échappait de son visage, pas plus qu’elle ne put rendre à sa démarche, l’allure affaissée et un peu traînante à laquelle son émotion l’avait contrainte quelques minutes auparavant.

Elle entra, ailée, aérienne.

Sa voix elle-même était douce et chantante, légère