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ÉPREUVES MATERNELLES

petits, et elle se désespérait, ne tenant plus à l’existence.

Paul Domanet épiait tous les signes de défaillance qu’elle laissait percer, et il se dit que la mesure devenait comble. Il ne désirait pas la mort de sa femme. Il pensa qu’il lui devait une compensation.

Un après midi, sans qu’il l’avertît, il ramena Richard et Rita.

Les deux petits se précipitèrent dans l’appartement à la recherche de leur mère, et à demi-folle de joie, elle les pressa sur son cœur, en leur prodiguant des baisers.

Ce fut pour elle un moment d’inoubliable bonheur. Elle dédaigna tout ce qu’elle avait souffert les jours précédents, et ses rancunes et ses révoltes s’envolèrent. Elle crut l’heureux temps revenu, et il lui sembla qu’elle supporterait les plus avilissantes besognes, maintenant que ses enfants lui étaient rendus.

Elle ne s’arrêtait pas de les couvrir de caresses et de les questionner sur leurs faits et gestes et sur la demeure d’où ils venaient.

Ils parlèrent de leurs jeux et d’une grande maison avec un jardin. Leur santé semblait parfaite et Denise constata, non sans un serrement de cœur, qu’elle ne leur manquait pas, à cet âge, où seul l’amusement comptait.

Mais elle ne s’appesantit pas sur ce sentiment toute à la joie de les revoir.

— Maman, pourquoi ne viens-tu pas avec nous ? lui demanda Rita en son langage enfantin.

— Moi, j’aimerais mieux revenir ici, posa Richard mais papa dit qu’on répare la maison, et qu’ensuite j’aurai une chambre pour moi tout seul, remplie de joujoux.

Denise revivait sous le bavardage de ses trésors retrouvés.

— Pourquoi les domestiques ne sont-ils plus là ? questionna Richard.

— Ils sont en congé.

Tous ces changements déroutaient le petit homme et il essayait de comprendre. Mais il abandonna ces préoccupations devant le goûter que préparait sa mère.

Paul Domanet était sorti voulant laisser Denise