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ÉPREUVES MATERNELLES

— Marie n’est pas dans sa chambre… il paraît qu’elle est allée se promener.

— Et mon dîner ? s’exclama Mme Dutoit, pâle de stupéfaction.

— Heureusement, il est tout préparé et je le servirai.

— Vous ne le pouvez pas ! vous le savez bien… allez chercher un extra tout de suite pour vous seconder. Il le faut absolument. Pressez-vous, qu’a donc pensé cette femme pour nous laisser ainsi dans l’embarras ! C’est insensé.

— Je n’y comprends rien, renchérit Vincente, j’aurais parié ma tête qu’elle était honnête et comme il faut. Je croyais la trouver là-haut.

— C’est inouï ! on ne sait plus qui l’on a chez soi ! Nous ferons chercher un serrurier pour ouvrir cette chambre demain. Elle ne reviendra plus cette cuisinière, elle nous a volés, c’est certain… il faudra compter minutieusement l’argenterie.

— Cela m’étonnerait qu’elle fût voleuse, et cependant sa conduite n’est pas claire.

— Je ne veux pas y penser ce soir ! il est temps que je m’habille.

— Pour moi, voyez-vous, Madame, elle aura eu peur, c’est sûr.

— Et de quoi ?

— Du père de Madame… elle l’a entendu qui se plaignait.

— Alors… vous l’avez rassurée ?

— Ma foi non !… je sais que Madame n’aime pas quand on parle du pauvre monsieur en enfance.

— Vous avez eu tort !… elle croit que nous séquestrons quelqu’un ! c’est stupide ! en voilà une complication ! elle est allée prévenir le commissaire de police ! il ne manquerait plus qu’il nous arrive pendant le dîner avec son écharpe, pour une perquisition ! Vincente, vous êtes d’une imprudence folle.

Ainsi furent expliquées les plaintes.

C’était un travers de Vincente de ne pas avouer que son ancien maître qui était fort âgé, ne possédait plus que des facultés ralenties.

Quand il désirait un peu plus de nourriture et qu’on la lui refusait, il pleurait comme un enfant dont il avait les gourmandises et les colères. Cela