Page:Fiel - Le Sacrifice et l'Amour, paru dans l'Écho de Paris du 3 février au 7 mars 1934.djvu/124

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— Je le préfère innocent, frappant au hasard de ses flèches, les yeux bandés.

— Non. Il y a trop d’imprévu, une flèche peut blesser… Je suis venue sans tarder t’annoncer cette joie… Je me sauve maintenant. Mère n’est pas au courant, naturellement, je ne veux pas lui donner de soucis, ni de faux espoirs. Ah ! quel ennui de ne pouvoir rêver tranquillement ! J’ai une préparation à terminer sur la thérapeutique des corizas… Comment peut-on songer à des réalismes pareils ! Et toi, Christiane, que deviens-tu ? Tu vis toujours sans amour au cœur ? Mère te juge une sainte, et ne tarit pas d’éloges sur tes charités.

Christiane baissa la tête. Les reproches de Mme  Fodeur résonnaient encore à ses oreilles, mais elle les oublia pour s’étonner de la réserve que la veuve avait montrée, la touchant. Puis elle pensa qu’elle avait voulu, par délicatesse, lui laisser le plaisir d’annoncer elle-même ses fiançailles.

Elle ouvrit la bouche pour commencer sa phrase, quand Bertranne, rapide, reprit la parole :

— Ce qui me désole, c’est que je t’évoquais en mère de famille. Je ne désespère pas cependant de te voir rencontrer un autre Robert Bartale.

— Robert Bartale ?

— Ah ! c’est vrai ! tu ne le savais pas ! mon bel amoureux S’appelle Robert Bartale…

Christiane, dans sa bergère, crut qué la maison croulait. Les murs, les meubles, le feu dans la cheminée,