Page:Fiel - Le Sacrifice et l'Amour, paru dans l'Écho de Paris du 3 février au 7 mars 1934.djvu/132

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Une rue à traverser l’occupait et une semblable entreprise absorbe toutes les facultés pour ne laisser intact que l’instinct de la conservation.

Sur le trottoir reconquis, la joie de Mme Fodeur se manifesta :

— Mon enfant, je vous félicite. Vous avez entendu tout à l’heure, par une voix plus autorisée que la mienne, que le célibat est l’apanage des saintes âmes. Il laisse la facilité de se dépenser pour l’humanité avec un cœur sans soucis. Je ne puis cependant regretter mon mariage puisqu’il me permet de souffrir par mes fils tués. J’aurais été plus dévouée au salut général, si je n’avais une fille… Hélas ! Son avenir me torture aussi et j’appelle Dieu à l’aide… Épargnez-vous ces angoisses…

Christiane eut envie de crier pour se soulager, que les angoisses qu’elle vivait étaient pires

Le ton protecteur de Mme Fodeur la blessait au vif, mais ses lèvres se scellèrent, car une seule parole eût déclenché un combat généreux entre Bertranne et elle, ce qu’elle voulait éviter.

Celle qui savait, devait se taire.

Si Christianne ne se sentait pas le courage de vivre en face d’une désespérée, il fallait qu’elle restât muette…

Maintenant que son sacrifice était consommé, elle ne pensait plus qu’à une chose : prévenir Robert. Elle comptait lui écrire, et un frisson la parcourait à cette idée.