Page:Fiel - Le Sacrifice et l'Amour, paru dans l'Écho de Paris du 3 février au 7 mars 1934.djvu/27

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pour me faire passer et m’a soufflé dans l’oreille : « que ne ferait-on pas pour des yeux pareils ! » Il paraît que mon aïeule paternelle promenait les mêmes. Et, bien qu’il ne lui en soit plus resté qu’un, elle a su si bien le faire manœuvrer, qu’elle a eu deux maris et demi. Je parle de demi, parce que la mort est venue briser cette troisième idylle.

— À ce compte, tu pourras avoir six maris, puisque tes deux yeux sont bien ouverts ! répliqua Christiane, avec gaîté.

— Eh ! eh ! dans ma profession, ce serait plutôt fâcheux d’être veuve cinq fois. On m’accuserait de donner à mes défunts mes bouillons de culture.

En plaisantant, les deux jeunes filles se préparaient à sortir.

— Au revoir, Madame. Merci pour votre aimable accueil. Je vous reverrai vendredi, afin que nous posions les premiers jalons de nos courses.

— C’est entendu. Mais réfléchissez encore avant de prendre une détermination définitive. Vous êtes si jeune.

— Je sais être ferme.

— Ne dis pas de bêtises, intervint Bertranne, nous dépendons toujours plus ou moins des événements. C’est vieux comme le monde, mais on renouvelle le dicton : Fontaine, je ne boirai pas de ton eau.