Page:Fiel - Le fils du banquier, 1931.djvu/83

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principes les meilleurs, mais tous ces garçons solides, pleins de vie, l’avaient bientôt annihilée. La douceur d’une fille et son aide l’eût soulagée et soutenue.

Elle ne connaissait pas Mathilde Bodrot et se demandait comment la jeune fille se conduirait vis-à-vis d’elle. Dans son entourage, bien des mères s’étaient plaintes de leurs brus. La pauvre Mme Plit, créature de dévouement, d’oubli de soi et de travail, se serait contentée d’un peu de respect pour ses années, d’un peu d’affection pour la peine qu’elle s’était donnée depuis son mariage, jour heureux certes, mais combien obscurci par la suite par un labeur obstiné.

Pourvu que cette Mathilde, riche à ce que prétendait Germain, ne fût pas arrogante et dure ! Son fils était bon, quoique brusque. Il ne fallait pas exiger des attentions de la part des garçons, mais parfois Mme Plit eût aimé qu’on lui demandât son avis. Elle eût désiré qu’on lui marquât un peu mieux que cette condescendance désinvolte qui la blessait par moments.

Le lendemain, Plit, avec sa belle chemise préparée par sa mère sur ses exigences, s’en alla, le cœur battant, vers le logis de sa promise. Quand il fut au milieu de la famille de son patron, il fut surpris par l’atmosphère pleine de déférence et d’affection démonstrative qui y régnait. C’était « mon cher papa, mon petit papa, veux-tu encore du café ? t’es-tu bien sucré ? », etc.

Germain Plit, abasourdi par ces phrases aimables et ces prévenances qu’il ignorait, osait à peine regarder Mathilde. Celle-ci lui avait dit de sa manière vive, quand il était entré :

— Alors, Monsieur Plit, il paraît que vous aimeriez m’épouser ? Je ne demande pas mieux, si toutefois vous savez répondre à quelques-unes de mes questions…

Ce début de femme décidée, qui changeait avec le silence de Mme Plit, avait un peu interdit Germain. Il commandait sa mère et il lui semblait naturel de continuer avec sa femme.

Mathilde, donc, avec une douceur pleine d’autorité, avait énuméré à son prétendant les principales qualités qu’elle désirait rencontrer chez celui qu’elle accepterait comme époux.

— D’abord, je désire que la confiance règne entre nous et que vous ne preniez nul amusement dehors sans moi… Vous travaillerez à l’atelier, je travaillerai à la maison et nous aurons donc le même besoin de nous distraire… De plus, je vous promets d’être une femme douce et attentionnée, mais j’exige la réciprocité… Je ne veux pas d’un mari brutal et sans ménagement, qui traite sa femme comme une esclave sans se soucier de son cœur ni de sa fierté… Papa nous traite gentiment et il faudra l’imiter… Je sais que vous pourrez tout promettre parce que les paroles sont faciles à prononcer, mais je veux vous voir