Page:Fiel - Le fils du banquier, 1931.djvu/97

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ne connaissait pas Mme  Alixin. Il ne voulut pas lui raconter les infortunes des Manaut, ce qui déplairait peut-être à Gérard.

Il riposta simplement :

— Je suis fâché de ce qui est arrivé… J’ai pleine confiance en mon ouvrier. Peut-être a-t-il éprouvé quelque malaise…

— Je serais curieuse de le savoir !

— Mais, certainement, il ne vous a rien soustrait, soyez-en sûre… Je vais l’interroger dès qu’il reviendra, et quand il vous apportera vos clés…

— S’il les apporte !…

— N’en doutez pas…

Le patron Bodrot se rapprocha de la porte afin de suggérer à sa visiteuse que l’entretien avait assez duré. Elle eût aimé rester jusqu’au retour du jeune homme, mais elle ne pouvait guère insister et elle partit.

Le patron attendit, non sans impatience, le retour de son ouvrier. Il se demandait à quel mobile avait obéi Gérard, et il était sûr d’obtenir une réponse claire.

Plit voyait que quelque chose d’anormal se passait, mais il n’osait rien demander. Il avait toujours peur de compromettre les progrès qu’il tentait de faire dans l’esprit de Bodrot et de sa fille.

Enfin, Gérard revint. Il n’avait pas perdu son aspect absorbé, et, avant de le questionner, son patron le contempla.

— Dites donc, Manaut, vous avez causé bien de la surprise à la cliente chez qui vous avez travaillé…

— Pourquoi donc, patron ?

— Vous le savez… et mieux que moi !

Gérard ne dit mot. Il leva les sourcils, attendant.

— Vous avez filé sans le lui dire, et quand elle vous a appelé pour vous donner un pourboire, vous n’avez rien répondu…

Gérard se tut. Plit, étonné, ne le perdait pas des yeux. Pourtant Manaut était toujours correct. Les clients l’appréciaient grandement.

Bodrot reprit :

— Pourriez-vous me raconter ce qui vous a passé par l’esprit ?

L’ouvrier se décida.

— J’avais hâte de sortir, parce que j’étouffais… Je ne suis pas accoutumé au chauffage central.

Telle fut la laconique réponse de Gérard.

Tout à fait remis de son émotion, maître de soi, il semblait dire :

— Je vous en prie, laissez-moi… Vous devinez que je ne puis rien ajouter de plus…

Cette impression était tellement forte que le patron la subit sans poursuivre l’enquête.