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marane la passionnée

Quand elle me vit, me préparant pour sortir, elle me répéta :

— Ces promenades me déplaisent !

— Puisque je suis Maria Lespir…

— Si ces personnes prennent des informations, tu seras humiliée.

— Oh ! moi, l’humiliation ne m’embarrasse pas !

Pour changer le cours des idées de maman, je lui donnai une représentation de ma transformation. Le béret à mentonnière, les lunettes jaunes, l’imperméable usagé, formaient un ensemble accablant.

Maman n’eut pas un sourire et elle murmura :

— Cette mascarade m’afflige. Tromper ainsi son prochain est mal. Je vais envoyer un mot chez ces Descré pour les prévenir que tu manqueras cette course.

— Tu n’y penses pas, maman ! Tu n’as pas à t’occuper des promenades de ta dame de compagnie. Réfléchis au peu de distractions que j’ai ! Je vais passer une heure avec une personne agréable.

— Nous allons partir pour la ville.

— C’est là que j’en rencontrerai des messieurs ! Que je les regarderai passer de mes fenêtres. Tu leur interdiras notre rue ?

— Tu es insolente.

— Je vais prévenir Mme Descré que nous partons pour une ville déserte.

Et je m’en allai, sans que les défenses, les reproches de maman pussent m’influencer.

J’étais odieuse, mais ces gronderies ne me touchaient pas. Je ne voyais que le profil de M. Descré se penchant vers sa mère.

Je galopai à m’essouffler. Mes chiens, heureux, sautaient autour de moi, avec des cris de joie qui répondaient à mon contentement.

En vue de la maison des Crares, je ralentis mon allure et je pris un air pondéré. Mme Descré tait dans le jardin en train de surveiller la plantation d’un arbuste. Voyant mes chiens, elle s’aperçut que j’arrivais. Elle vint au-devant de moi.