Page:Fiel - Trop belle, 1926.djvu/123

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Tout de suite, la bonne dame s’installa à son bureau, et avec Sylviane, elles élaborèrent quelques lignes qui devaient transporter d’aise le voyageur.

Ce fut un jour heureux.

Le lendemain amena encore une autre joie : Sylviane eut la visite de son professeur d’harmonie qui lui annonça que la polonaise qu’elle avait composée serait jouée dans un concert organisé par lui.

Mademoiselle Foubry ne s’attendait nullement à cet honneur. Elle avait travaillé en vue de donner une orientation sérieuse à son existence et un dérivatif à son souci. La gloire lui arrivait. Elle eut une satisfaction intérieure en constatant qu’elle avait à portée de son intelligence, un gagne-pain inespéré dans le domaine artistique.

Toutes les perspectives lui souriaient aujourd’hui : mariage et succès.

Elle fut forcée d’oublier quelque peu le retour de Luc, prise par les répétitions de son morceau.

Se découvrant artiste, elle y assistait avec une ferveur des plus entraînantes. Ses interprètes s’émerveillaient devant sa beauté égale à son talent. Pour elle, ils se surpassaient, et, à la dernière répétition où assistaient quelques privilégiés, elle eut une véritable ovation.

Ah ! comme elle regrettait les jours mornes du dernier automne où elle se morfondait dans son rôle ingrat de fille à caser !… Aujourd’hui, la vie prenait une coloration tout autre, parce que sa personnalité s’affirmait par son travail.

Sylviane se trouvait doublement heure use en songeant à Luc. Quelle joie d’aller à lui, non comme une femme qui attend la protection, l’assistance du mari, mais avec la conscience d’une intelligence qui a une valeur propre.

Quelle fierté de se savoir indépendante, et comme le mariage lui paraissait plus élevé et plus doux, de n’être pas basé sur la nécessité.

Le concert était fixé au 30 Octobre.

Madame Bullot se promettait de s’y rendre.