Page:Fiel - Trop belle, 1926.djvu/85

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— Bon… je pourrai procéder par élimination… mais voici notre train…

— Montons…

— Après toi…

— Mais non… monte !…

Chacun vit que l’autre le surveillait, méfiant, et qu’il n’y avait aucun moyen de tricher… Ils montèrent donc tous deux, pestant de leur obstination mutuelle.

Face à face, dans le compartiment, ils se sourirent avec force et dirent ensemble :

— Enfin… nous y voilà !…

— Voici encore un passé qui s’en va… dit Francis.

— Ce sera un bon souvenir de plus… répondit paisiblement Louis.

Mais l’un et l’autre avait décidé intérieurement de descendre au prochain arrêt et de rester en gare sans éveiller l’attention du partenaire. Le temps était précieux, il valait mieux n’en pas perdre.

Ils se préparèrent donc en esprit, les yeux fermés, stimulant le sommeil.

— Je descends… prononça Francis… je vais au Buffet.

— Moi… il me faut des journaux.

Ils sautèrent sur le quai et se dirigèrent vers le but tout en s’épiant.

Au départ du train, leurs places restèrent vides. Chacun riait de la déconvenue de l’autre, et se croyait persuadé que soi seul était le plus fin.

Francis qui se cachait au buffet, attendit une heure pour retourner sur le quai et Louis qui était allé faire une promenade en ville, ne se pressa pas.

Francis reprit le premier train qui se dirigeait vers Vichy et Louis monta dans le second.

Ils exultaient tous deux de s’être joués et comptaient maintenant remporter la victoire qui leur tenait au cœur.

Ce fut avec une joie sans pareille qu’ils réintégrèrent leurs chambres d’hôtel où ils arrivèrent à tour de rôle dans la nuit.