Page:Fielding - Tom Jones ou Histoire d'un enfant trouvé, tome 3.djvu/44

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Il lui dit alors que Jones n’étoit pas couché seul, et il le lui dit en termes trop crus, pour que nous nous permettions de les répéter. Honora indignée de son effronterie, le traita d’impudent maroufle, et se hâta d’aller retrouver Sophie. Elle l’instruisit du succès de son message, ainsi que des détails fort étranges qu’elle venoit d’apprendre, et qu’il lui plut encore d’exagérer, se sentant aussi irritée contre le maître, que s’il eût proféré les paroles malhonnêtes sorties de la bouche de son valet. Elle se répandit en discours injurieux sur le compte de Jones, rappela l’histoire de Molly Seagrim, et conseilla à sa maîtresse d’oublier un amant qui ne s’étoit jamais montré digne d’elle. Pour mieux exciter son courroux, elle donna à la manière dont il l’avoit quittée elle-même, une interprétation maligne trop justifiée, il faut en convenir, par la circonstance actuelle.

Sophie, accablée d’un coup si cruel, n’eut pas d’abord la force d’imposer silence à sa femme de chambre. À la fin pourtant, elle l’interrompit. « Je ne puis croire de lui cette infamie ! s’écria-t-elle ; quelque scélérat l’aura calomnié. Vous tenez, dites-vous, le fait de son ami ; mais un ami trahit-il de pareils secrets ?

— Je suppose, reprit Honora, que le drôle est le confident de ses plaisirs. Je n’ai vu, de ma vie,