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différentes difficultés pratiques, que nous allons énumérer.

On ne peut communiquer à l’air chaud une pression considérable nécessaire pour produire un grand effet mécanique, sans porter cet air à une température extrêmement élevée. Or, à ces températures, aucune pièce métallique ne peut longtemps résister. Les surfaces métalliques s’oxydent et se détériorent ; aucun frottement n’est plus possible à ces degrés extrêmes de température. Les tiroirs qui servent à l’introduction et à la distribution de l’air chaud, se déforment ; les garnitures se brûlent ; les segments du piston se soudent ; les huiles qui lubrifient les rouages, distillent ou se décomposent. En un mot, ces températures élevées font une guerre incessante à tout organe mécanique.

La vapeur d’eau employée dans les machines ordinaires (qu’on le remarque bien, car c’est là un de ses plus précieux avantages) n’exerce aucune action destructive de ce genre sur les organes des machines. Sa température n’atteint jamais plus de 150 à 170°, dans les machines où elle agit avec les plus énergiques pressions. Bien plus, dans toutes les machines à vapeur, quelle que soit la tension de l’agent moteur, l’eau qui est entraînée avec la vapeur, à l’état globulaire ou par simple projection, vient sans cesse lubrifier les surfaces métalliques. Elle émulsionne les huiles qui graissent les rouages, et ne fait qu’adoucir leur jeu. En même temps, elle les refroidit constamment, par son évaporation, et laisse aux garnitures toute leur élasticité.

Le défaut que nous venons de signaler est fondamental, et sera toujours l’obstacle le plus sérieux, irrémédiable peut-être, au développement des machines à air chaud, quelles que soient leurs dispositions secondaires.

Voici maintenant des difficultés d’un autre ordre.

L’air, étant mauvais conducteur de la chaleur, est très-lent à s’échauffer, et très-lent à se refroidir, une fois chaud. Il est presque impossible de l’échauffer à travers les parois d’un récipient, et le meilleur parti à prendre, c’est de le chauffer, non à travers les parois d’un récipient, comme dans la machine Ericsson, mais en le faisant passer directement sur le combustible en ignition, ainsi qu’on le fait dans la machine Pascal de Lyon.

Mais, en raison de sa mauvaise conductibilité, l’air, une fois chaud, se refroidit lentement. La condensation nécessaire pour produire l’effet moteur, se fait donc avec lenteur et difficulté. De là naît ce que l’on a appelé l’équilibre de température, c’est-à-dire qu’après un certain temps de fonctionnement, les régénérateurs, les toiles métalliques, le cylindre régénérateur, et tous les autres organes qu’on tenterait d’introduire comme intermédiaires, tout arrive à la même température. Par suite, la pression étant égale à la contre-pression, le piston moteur s’arrête.

Disons enfin, que l’air chaud ne pourrait servir avec efficacité comme moteur dans les machines qui doivent alternativement s’arrêter et se mettre en action. Les machines à air chaud sont très-longues à mettre en train. Il faudrait, pour ainsi dire, pouvoir installer à côté d’une machine à air chaud, un moteur à eau, d’une puissance capable de mettre en mouvement par lui-même, la pompe à air de la machine à air chaud.

Ces considérations montrent qu’il existe des difficultés bien graves dans l’emploi de l’air chaud comme moteur. Nous ne voulons pas nier, assurément, que ce problème, si important au point de vue de l’économie et de la sécurité, soit jamais réalisé ; nous avons seulement voulu mettre en relief les difficultés essentielles de la question, au double point de vue théorique et pratique.

3o Les machines à vapeur régénérée. — Au lieu d’échauffer et de refroidir alternativement une même masse d’air, on peut, abordant le problème par un autre moyen, réchauffer la vapeur qui sort du cylindre après avoir exercé son action sur le piston, et la