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Sous cette influence, le fluide neutre de la garniture extérieure est décomposé ; le fluide positif est repoussé et s’écoule dans le sol par le corps de l’opérateur qui tient à la main la bouteille. Le fluide négatif de la même garniture extérieure est attiré par le fluide de nom contraire qui existe à l’intérieur de la bouteille.

L’interposition d’une substance non conductrice, comme le verre, empêche ces deux électricités libres de se réunir pour recomposer du fluide neutre, comme elles le seraient si elles étaient séparées par une substance conductrice de l’électricité. Le verre de la bouteille remplit donc l’office d’une sorte de barrière qui sépare les deux fluides libres, les maintient à l’état d’activité, et permet d’accumuler ou de condenser ainsi entre les deux garnitures une masse d’électricité. Cette masse est d’autant plus considérable que la garniture extérieure étant toujours en communication avec le sol, c’est-à-dire avec le grand réservoir naturel de l’électricité neutre, emprunte au sol autant d’électricité que peut en accumuler la garniture intérieure de la bouteille.

Ainsi s’explique ce fait de la présence des deux électricités de nom contraire dans les garnitures interne et externe de la bouteille de Leyde.

Fig. 250. — Décharge de la bouteille de Leyde.

Maintenant, si, à l’aide d’un arc métallique conducteur PP′ (fig. 250) garni d’un manche isolant en verre MM′, c’est-à-dire d’un excitateur, on vient à toucher à la fois les garnitures interne et externe de la bouteille, on présente un moyen de communication entre ces deux garnitures. Alors les deux électricités accumulées s’échappent à la fois par cet arc conducteur ; elles s’élancent à la rencontre l’une de l’autre, et se recombinent en reformant du fluide neutre, et produisant entre le bouton A de la bouteille et le bouton de l’excitateur, une vive étincelle, ainsi qu’il arrive toutes les fois que l’on met en présence deux corps différemment et fortement électrisés.

Si, au lieu d’établir la communication entre les deux électricités au moyen d’un arc métallique isolé par deux manches de verre, on établit cette communication avec les deux mains, la personne qui fait cette expérience reçoit une profonde secousse, parce que la recomposition des deux fluides, et l’ébranlement physique considérable qui en est la conséquence, se fait à l’intérieur de son corps et dans l’intimité de ses organes.

C’est précisément ce qui arriva à Musschenbroek lorsque, pour la première fois, il vint à toucher fortuitement, d’une main, le conducteur de la machine électrique en activité, pendant qu’il tenait, de l’autre main, la bouteille de verre pleine d’eau électrisée.

Telle est l’analyse, telle est l’explication que Franklin donna aux physiciens de son temps des effets de la bouteille de Leyde. Mais comment le philosophe américain parvint-il à démontrer la vérité de l’explication qui précède ? C’est ce qu’il importe d’exposer avec soin.

Dans une première expérience, Franklin présente à une bouteille de Leyde chargée, une boule de liége attachée à l’extrémité d’un fil de soie, et il voit que la boule est attirée par l’enveloppe extérieure de la bouteille, tandis que le fil métallique communiquant avec l’intérieur, la repousse.

« Placez, dit Franklin, une bouteille de Leyde électrisée sur de la cire, matière isolante ; tenez à