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Si ces conditions ne sont pas exactement remplies, le paratonnerre, au lieu de préserver un édifice, pourrait y occasionner des accidents graves.

Si sa pointe était trop émoussée, ou s’il existait dans la longueur du conducteur, une solution de continuité, l’électricité s’accumulerait dans la tige du paratonnerre, par l’influence des nuages orageux, et l’appareil se trouverait ainsi transformé en un corps conducteur chargé d’une grande masse d’électricité et isolé seulement en partie. Il constituerait donc un véritable réservoir d’une quantité considérable d’électricité, laquelle, se déchargeant presque inévitablement sur les corps voisins, produirait tous les effets d’une forte décharge électrique.

Un paratonnerre qui présente ce double défaut, dans la continuité du conducteur et dans sa communication avec le sol, est extrêmement dangereux, même dans le cas où il n’est pas frappé par la foudre. L’influence de l’électricité atmosphérique suffit, en effet, pour y concentrer une grande quantité de fluide, qui tend à se décharger latéralement sur tous les corps voisins. L’étincelle électrique, qui part alors de la tige métallique, imparfaitement isolée, peut frapper ces corps ou les enflammer. C’est par un effet de ce genre que périt, ainsi que nous l’avons raconté, le professeur Richmann à Saint-Pétersbourg en 1753.

Voyons maintenant à quelles règles de construction il faut se conformer pour qu’un paratonnerre remplisse les conditions énumérées plus haut, pour qu’il jouisse de toute son efficacité protectrice.

La tige d’un bon paratonnerre a 9 mètres de longueur. Elle se compose, habituellement, de trois pièces ajoutées bout à bout, savoir : une barre de fer de 8m,60 ; — une baguette de laiton de 0m,60 ; — une aiguille de platine de 0m,05.

L’emploi du platine dans cette aiguille terminale, a pour but d’éviter l’oxydation. Si l’on faisait simplement usage, pour former cette pointe, d’une tige de fer amincie, l’oxydation s’en emparerait promptement, et comme les oxydes métalliques sont de très-mauvais conducteurs de l’électricité, la conductibilité de la tige serait détruite en ce point, et par conséquent tout l’effet du paratonnerre serait manqué.

L’ensemble de ces trois tiges, liées entre elles, forme un cône, ou une pyramide, qui s’amincit régulièrement jusqu’au sommet, et dont la base a 5 centimètres de diamètre.

L’aiguille de platine est fixée à la baguette de laiton avec de la soudure d’argent, et l’on entoure le point de la jonction, d’un petit manchon de cuivre.

Le conducteur de paratonnerre est une barre de fer, à section carrée, de 15 à 20 millimètres de côté, formée par la réunion, bout à bout, d’un nombre suffisant de ces barres de fer. Il faut apporter le plus grand soin dans le raccord de ces différentes barres métalliques, et éviter toute solution de continuité entre elles. S’il existait, en effet, une seule solution de continuité dans la longueur du conducteur, l’édifice serait exposé, comme nous l’avons indiqué plus haut, à recevoir une décharge atmosphérique.

L’instruction de Gay-Lussac, en 1823, prescrivait de raccorder les différentes parties du conducteur au moyen de boulons à vis. Dans l’instruction supplémentaire de 1855, on a prescrit, avec raison, pour mieux assurer la continuité métallique, d’entourer chaque point de jonction d’un bourrelet de soudure à l’étain. Les parties métalliques en contact sont, de cette manière, soustraites à l’action oxydante de l’air, et les solutions de continuité deviennent moins à craindre.

Pour maintenir le conducteur en place, tant sur les toits que le long des murs, on se sert de supports de fer, terminés par deux dents en forme de fourchette, entre lesquelles la tige du conducteur est fixée à l’aide d’une clavette.