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le prix extraordinaire de 60 000 francs, mais seulement une somme de 3 000 francs qui fut accordée à Davy. La rémunération était faible sans doute, comparée à la grandeur, à l’importance des découvertes du savant anglais. Mais si l’on se rappelle la guerre acharnée qui divisait alors l’Angleterre et la France, on sentira toute la valeur de ces trois mille francs envoyés, à une pareille époque, de Paris à Londres, au nom de Napoléon. En cela, la France obéissait à ces traditions généreuses qui lui font chercher, découvrir, proclamer le mérite étranger, et décerner la palme du génie scientifique, sans regarder au drapeau d’une nation ennemie[1].

Les travaux de Davy avaient excité chez les savants de tous les pays une émulation extraordinaire. C’est en France que se manifestèrent les plus importants résultats de cette noble rivalité. Dans l’ouvrage de Gay-Lussac et Thénard, Recherches physico-chimiques, qui fut publié en 1811, on trouve l’exposé d’un grand nombre d’observations remarquables sur les effets physiques et chimiques de la pile.

Ces recherches de Gay-Lussac et Thénard furent commencées à l’occasion de la grande pile que Napoléon avait donnée à l’École polytechnique. Comme Berthollet lui parlait un jour des grands travaux de Davy sur l’électricité, l’Empereur demanda, avec son impétuosité ordinaire, pourquoi ces découvertes n’avaient pas été faites en France.

— Sire, répondit Berthollet, c’est que jusqu’à ce jour nous n’avons pas possédé de pile voltaïque assez puissante.

— Eh bien ! qu’on en construise sur-le-champ une suffisante, et qu’on n’épargne ni soin ni dépense.

C’est ainsi que fut construite aux frais de l’État la magnifique pile voltaïque de l’École polytechnique.

Cette pile était composée de 600 couples de cuivre et de zinc de 9 décimètres carrés pour chaque plaque ; toute la batterie avait 54 mètres carrés de surface. Cet appareil n’existe plus ; mais il nous a été possible de le reconstituer au moyen des débris qui en sont conservés dans le cabinet de l’École polytechnique. On le voit représente figure 342, page 669.

Fig. 343. — Gay-Lussac.

Gay-Lussac et Thénard reconnurent et apprécièrent avec beaucoup d’exactitude l’influence du nombre des couples de la pile sur l’intensité de ses effets, et celle de l’acidité

  1. Après la récompense solennelle accordée aux travaux de Davy, aucun autre prix n’a été décerné par notre Académie des sciences pour encourager les progrès de l’électricité. Il a été question, sur une demande de la famille Œrsted, d’accorder une récompense à ce physicien, pour sa découverte, faite en 1820, de l’action de la pile sur l’aiguille aimantée, qui a eu pour résultat la création de l’électro-magnétisme, et toutes les applications de ce fait immense réalisées aujourd’hui au grand bénéfice des nations. Mais ce projet n’eut point de suite, les ministres de la Restauration ayant refusé de mettre à la disposition de l’Académie la somme promise par le gouvernement consulaire.

    L’importance extrême du rôle que l’électricité est appelée à remplir dans la science et l’industrie n’ont pas manqué de frapper l’attention de l’Empereur Napoléon III. Un des premiers actes de son pouvoir a été l’institution, faite le 28 février 1852, d’un prix de 50 000 francs à décerner en 1857, pour récompenser les applications pratiques de la pile de Volta. Ce prix n’a pas été décerné encore.