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physiciens allemands qui professaient alors les théories chimiques, que le docteur Heimand, de Vienne, chercha aussi à prouver, par l’expérience, que l’oxydation était la seule source d’électricité dans l’appareil électromoteur de Volta.

Mais de tous les savants de l’Europe, celui qui développa la théorie chimique de la pile avec le plus de puissance et de talent, ce fut Parrot, physicien russe, professeur à Dorpat. Parrot exposa la théorie chimique de la pile avec une telle supériorité et une si grande force de raisonnement, qu’il mérite d’être considéré comme le fondateur de cette théorie. C’est en 1801 qu’il commença à faire connaître ses idées sur cette matière ; il les développa ensuite dans divers mémoires publiés en Allemagne, et plus tard dans son ouvrage : Abrégé de physique théorique[1]. Parrot s’était proposé, suivant ses propres expressions, « d’instruire de toutes pièces le procès du physicien de Pavie » ; et l’on va voir qu’il était difficile de composer un plus redoutable réquisitoire.

Il commence par s’attaquer à l’expérience fondamentale de Volta, qui consiste, comme nous l’avons dit plusieurs fois, à montrer que deux métaux isolés, mis en contact, étant brusquement séparés, et l’un d’eux étant porté sur le plateau du condensateur, cet instrument accuse une manifestation d’électricité, appréciable par l’écartement des feuilles d’or. En rapprochant toutes les observations publiées à propos de ces expériences, et invoquant surtout celles de Wollaston, rapportées plus haut, Parrot faisait voir que les résultats avaient toujours été absolument nuls toutes les fois que l’on avait su éviter les véritables causes électromotrices, c’est-à-dire l’action chimique que développe le doigt mouillé ou sec, venant à toucher un métal aussi oxydable que le zinc ; comme aussi la pression, la friction, l’élévation de température, que détermine dans cette circonstance le contact du doigt avec le plateau condensateur.

Généralisant ensuite le fait, le physicien russe prouvait que le contact des métaux hétérogènes, loin d’être une cause de production d’électricité, retardait, au contraire, le mouvement du fluide électrique, de telle sorte que l’on pouvait isoler ou immobiliser de petites quantités de ce fluide, en lui faisant traverser un certain nombre de couples métalliques hétérogènes.

Pour prouver que l’hétérogénéité était bien une cause de diminution et non d’exaltation du pouvoir conducteur, Parrot démontrait par l’expérience, que la même quantité de fluide électrique, qui ne pouvait se transporter à travers un conducteur formé d’un certain nombre de métaux hétérogènes, se transmettait parfaitement à travers un conducteur formé du même nombre de fragments d’un même métal.

Après avoir détruit, de cette manière, les fondements de la théorie du contact, Parrot l’attaquait dans ses applications. Selon Volta, la surface des couples de la pile n’exerce aucune influence sur la quantité d’électricité produite, qui n’est proportionnelle qu’au nombre des couples de l’appareil. Parrot établissait, au contraire, ce fait bien vulgaire aujourd’hui, que l’intensité des effets de la pile augmente avec la surface, et non avec le nombre des couples.

Volta avait posé en principe, que la puissance de son électromoteur devait s’accroître

  1. Le travail de Parrot sur la théorie de la pile est un mémoire de concours qui fut couronné en 1801 par la Société batave des sciences de Haarlem. Il reproduisit à diverses reprises ses idées dans les mémoires suivants, insérés dans les Annales de physique de Gilbert (en allemand). Voyez :

    Esquisse d’une nouvelle théorie de l’électricité galvanique, et sur la décomposition de l’eau opérée par l’électricité, t. XII, p. 49 (1802).

    Sur les moyens de mesurer l’électricité, t. LXI, p. 253.

    Sur les déviations dans l’électromètre, t. LXI, p. 267.

    Sur les effets du condensateur, t. LXI, p. 280.

    Sur la théorie de Volta relative à l’électricité galvanique, t. LXI.

    Enfin, il les a rappelées de nouveau dans une « Lettre adressée à MM. les rédacteurs des Annal. de chim. et de phys., sur les phénomènes voltaïques. » (Annal. de chim. et de phys., t. XLII, p. 45.)