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divers peuples soumis à l’autorité du czar, est si considérable, qu’ils ne peuvent former entre eux des relations suivies, et qu’ils sont, pour la plupart, comme étrangers les uns aux autres. Toutes ces circonstances devaient donner à l’établissement de la télégraphie chez les Russes un prix inestimable. Aussi l’empereur Alexandre attachait-il la plus haute importance à cette question. Malheureusement les résultats répondirent mal à son impatience et à ses désirs. Un grand nombre de personnes avaient essayé, à Saint-Pétersbourg, de construire des télégraphes, mais leurs tentatives avaient été si mal combinées, qu’il en reste à peine des traces. Nous ne connaissons de ces essais infructueux que l’esquisse de machine télégraphique qui fut proposée au czar par l’abbé Valentin Haüy, connu par sa méthode d’éducation des aveugles. Dans une brochure publiée en 1805, Valentin Haüy annonce qu’il vient d’appliquer heureusement sa méthode à la composition d’un système et d’une machine télégraphique dont il a accommodé le service « tout exprès pour l’usage de l’empire de Russie ». Il est difficile de comprendre comment une méthode imaginée pour les aveugles peut servir à lire des signaux : cette idée n’eut aucune suite.

Les journaux annoncèrent en 1808, qu’un M. Volque allait enrichir Saint-Pétersbourg d’un télégraphe aérien. Cet appareil devait mal remplir les vues du gouvernement, puisque son auteur crut devoir l’année suivante le transporter à Copenhague. Cependant, en 1809, le consul de Danemark fit au gouvernement français la demande d’un télégraphe, ce qui ne plaide pas en faveur de l’appareil de M. Volque.

Tous les essais entrepris en Russie pour la création d’une ligne télégraphique, avaient donc échoué, et depuis vingt ans une commission officielle, instituée en vue de cette question, n’avait encore rien produit, lorsqu’en 1831, un ancien employé de la télégraphie française vint proposer à l’empereur Nicolas de doter la Russie du moyen de correspondance depuis si longtemps cherché. C’était M. Chatau, qui, au moment de la révolution de 1830, avait été destitué avec Abraham Chappe. Le système qu’il avait imaginé était une modification du télégraphe Chappe, ayant pour principal avantage de diminuer le nombre des signaux.

Fig. 23. — Télégraphe aérien établi en Russie par M. Chatau.

La figure 23 représente le télégraphe de jour de M. Chatau, d’après un mémoire assez obscur, et sans doute rendu obscur volontairement, qui a été publié à Paris par l’auteur, en 1842[1]. C’est le télégraphe français disposé de manière à produire un ordre différent de signaux.

En plaçant des lanternes aux bras de ce télégraphe, M. Chatau obtenait des signaux de nuit, dont le vocabulaire avait été composé par lui avec un très-grand soin.

  1. Télégraphe de jour et de nuit par Pierre-Jacques Chatau. Paris, 1842, grand in-8o, avec 3 planches gravées.