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Paris, avec les principaux centres administratifs. Mais la télégraphie électrique commençait à gagner du terrain en sentant approcher le moment de sa réalisation pratique, et toute idée d’extension ou de perfectionnement de la télégraphie aérienne, se trouvait ainsi paralysée.

On ne crut pas cependant devoir attendre davantage pour doter nos établissements d’Algérie d’un système télégraphique. Un réseau aérien fut construit en Algérie de 1844 à 1854, sous la direction de M. César Lair. Les travaux furent exécutés par le génie militaire, d’après les données fournies par les employés du télégraphe. Ils ne furent pas d’ailleurs sans danger : souvent il fallut s’entourer de bataillons, pour protéger les travailleurs contre les attaques des indigènes.

Les lignes partant d’Alger desservaient vers l’ouest et le sud-ouest : Blidah, Milianah, Médéah, Cherchell, Tenez, Orléansville, Mostaganem, Oran, Sidi-Bel-Abbès et Tlemcen ; vers l’est : Aumale, Dellis, Bougie, Sétif, Constantine, Philippeville, Guelma, Bône, et enfin vers le sud-est : Batna et Biskara.

Les postes télégraphiques ne ressemblaient pas à nos stations françaises. C’étaient de véritables blockhaus, flanqués de deux petits bastions, et environnés d’une palissade, percée de meurtrières. Ainsi mis à l’abri, le poste télégraphique pouvait résister à toutes les attaques des indigènes ou aux irruptions des malfaiteurs. Il faut dire néanmoins, qu’ils n’eurent jamais à repousser aucune attaque.

En raison de la pureté habituelle de l’atmosphère, les stations télégraphiques de l’Afrique française étaient séparées par une distance de douze kilomètres. M. César Lair avait simplifié les signaux, ainsi que le vocabulaire, et ces réformes judicieuses accéléraient sensiblement le passage des dépêches.

L’appareil télégraphique fut réduit à sa plus simple expression. Il ne consista plus qu’en un régulateur fixe, avec deux indicateurs mobiles ; le tout soutenu par deux poteaux parallèles. Un vocabulaire spécial dut être appliqué à l’appareil ainsi modifié par la suppression d’une des pièces principales.

Par son extrême simplicité, le télégraphe d’Afrique présentait moins de chances de dérangements et fatiguait peu l’opérateur. Il rendait plus facile le passage des dépêches, au moyen de son vocabulaire, aussi riche que celui de France, quoique basé sur un nombre de signaux moindre. C’est le même système, qui fut adopté dans la régence de Tunis, et plus tard par notre administration télégraphique pour la guerre d’Orient.

Pour établir très-rapidement les lignes, M. César Lair fit construire des supports formés de deux poteaux obliquement croisés aux deux tiers de leur hauteur, et pouvant se fermer comme les deux lames d’une paire de ciseaux. La partie la plus longue des poteaux se démontait en deux pièces, et les indicateurs de la machine pouvaient se replier, avec leur queue, sur le régulateur. Un télégraphe, machine et support, démonté et replié, ne présentait pas une longueur de plus de 3 mètres, et pouvait facilement être transporté par un seul mulet. En un quart d’heure, il pouvait être déchargé, monté et prêt à fonctionner. « C’était là, dit M. Éd. Gerspach, le véritable télégraphe aérien de campagne, vainement cherché sous la République et l’Empire. » Les stationnaires étaient choisis parmi des sous-officiers en congé, habitués, par un long séjour, au climat de l’Afrique et aux mœurs du pays.

La télégraphie aérienne a parfaitement fonctionné pendant quinze ans, dans notre colonie d’Afrique, sous la direction de M. César Lair. Elle fut remplacée, en 1859, par la télégraphie électrique.

M. César Lair, le même qui avait fait construire, en 1844, la première station de télégraphie aérienne, faisait démolir le dernier blockhaus de télégraphie aérienne.

En France, depuis l’année 1846, la télé-