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tirage s’opère ensuite comme pour une lithographie ordinaire.

M. Poitevin, comme nous l’avons dit dans l’histoire générale de la photographie, fit cette autre découverte importante, que la gélatine mélangée de bichromate de potasse, ne peut plus se gonfler par l’eau lorsqu’elle a été frappée par la lumière ; tandis que les parties non influencées par l’agent lumineux, se gonflent rapidement, en absorbant l’eau. En prenant une empreinte de cette gélatine ainsi gonflée inégalement, et reproduisant ce moulage de gélatine en une planche de cuivre par la galvanoplastie, on arrive à former d’assez bonnes planches pour la gravure en taille-douce ou la typographie.

Tel est le principe des procédés qui ont servi à créer, entre les mains de M. Alphonse Poitevin, la photo-lithographie et la gravure héliographique, et tel fut le point de départ de l’invention qui nous occupe. Le procédé primitif de M. Poitevin a été singulièrement perfectionné, mais il est juste de proclamer les droits du véritable créateur de cet art.

M. Ch. Nègre est un autre inventeur, longtemps admiré à juste titre, et qui pourtant a fini, comme M. Poitevin, par se laisser distancer. Pendant dix ans on a admiré des gravures héliographiques dues à M. Nègre, vraiment magnifiques comme finesse et comme grandeur ; mais la persistance de cet artiste à tenir ses procédés secrets, son peu de désir de rendre son œuvre publique pour la voir s’améliorer en d’autres mains, l’ont privé des avantages qu’il aurait pu recueillir en suivant une autre voie.

Le procédé de M. Nègre consiste dans l’emploi de certains agents chimiques dont l’auteur s’est réservé le secret. Il se sert aussi de bitume de Judée, mais cette substance ne joue ici qu’un rôle accessoire : elle ne sert qu’à ménager une réserve transitoire, qui permet de dorer, par la pile, toutes les parties qui ne doivent pas être attaquées par les acides. Cette dorure étant faite, on enlève le bitume avec de l’essence de térébenthine, et la planche présente alors l’apparence d’une damasquinure, dans laquelle les parties dorées forment les blancs, tandis que les parties mises à nu, restent seules exposées à la morsure des acides. La planche d’acier ainsi obtenue sert ensuite au tirage en taille-douce.

M. Baldus s’applique, depuis longtemps, à la solution du problème de la gravure héliographique, et il l’a parfaitement résolu, si l’on en juge par les spécimens de gravure photographique qui accompagnent ces pages des Merveilles de la science (fig. 85, 86, 87, 88), et qui ont été préparées par M. Baldus, en cuivre de relief, nécessaire pour le tirage typographique.

M. Baldus a fait usage de plusieurs procédés dans les recherches qu’il a consacrées, pendant plus de quinze ans, au problème de la gravure photographique. Il s’est d’abord servi de la galvanoplastie, qu’il supprime complétement aujourd’hui.

C’est en 1854 que M. Baldus avait recours à la galvanoplastie pour reproduire les finesses des épreuves photographiques. Comme nous avons, à cette époque, aidé M. Baldus de nos conseils scientifiques, dans ses opérations de galvanoplastie, nous pouvons décrire avec exactitude, le procédé dont il faisait alors usage. Voici donc ce procédé.

On prend une lame de cuivre, sur laquelle on étend une couche de bitume de Judée. À cette lame de cuivre recouverte de la résine impressionnable, on superpose une épreuve photographique sur papier transparent, de l’objet à graver. Cette épreuve est positive, et doit, par conséquent, se traduire en négatif sur le métal, par l’action de la lumière. Au bout d’un quart d’heure environ d’exposition au soleil, l’image est produite sur l’enduit résineux ; mais elle n’y est point visible. On la fait apparaître, en lavant la plaque avec un dissolvant, qui enlève les parties non impression-