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et même des torpilles de tous les systèmes.

Ce bateau a la forme d’un cigare ; il a deux coques et entre l’une et l’autre des compartiments sont ménagés, pour recevoir l’eau et provoquer ainsi sa descente.

La respiration des matelots est assurée par une provision d’air comprimé.

Il ne s’agit, en tout cela, que de projets, et il est à craindre qu’ils aient le sort du Pacificateur.

En France, on a repris, en 1886, à Toulon, l’étude des bateaux sous-marins, commencée par l’amiral Bourgeois.

Le bateau sous-marin de l’amiral Bourgeois avait une stabilité parfaite à la surface de l’eau ; mais son équilibre entre deux eaux n’avait pu être obtenu, ni au repos ni en marche ; il montait ou descendait sans cesse. Le Gymnote, tel est le nom du nouveau bateau sous-marin qui a été construit à Toulon en 1886, dans les chantiers de l’État, a bénéficié des derniers progrès de l’art de l’ingénieur ; il s’enfonce, reste sur place, et revient à la surface, à la volonté du marin chargé de le diriger.

Le Gymnote a été mis en chantier à Toulon, sous la direction de M. Romazetti, ingénieur de la marine, le 30 avril 1887, et lancé à l’eau le 23 septembre 1889. L’illustre ingénieur de marine, Dupuy de Lôme, qui a touché à tant de questions, avait tracé le plan général de ce bateau sous-marin, qui a été exécuté sur chantier, par le commandant du port de Toulon, M. Zédé.

Le Gymnote (fig. 291, p. 360) a la forme d’un faisceau effilé. Il mesure 17 mètres de longueur sur 1m,80 de diamètre. C’est assez dire que ceux qui se trouvent dans l’intérieur peuvent tout juste se tenir debout. Il ne déplace que trente tonnes ; sous l’eau il doit pouvoir marcher avec une vitesse de 10 nœuds. Pour déterminer son immersion, il suffit de faire pénétrer une certaine quantité d’eau dans des réservoirs intérieurs. Pour lui imprimer la direction, on met en action deux gouvernails horizontaux, tout à fait analogues au gouvernail de la torpille automobile de Whitehead.

L’enfoncement sous l’eau est produit par les deux gouvernails horizontaux, et par l’introduction de l’eau de la mer dans des réservoirs disposés dans l’entre-cloisonnement des deux enveloppes de la coque. En ouvrant plus ou moins les robinets, on descend plus vite et plus profondément. La stabilité du bateau est complète ; ce qui est d’autant plus remarquable que, dans les bateaux sous-marins de l’amiral Bourgeois, il suffisait d’un léger excès d’eau dans les réservoirs pour déterminer la chute du bateau au fond de la mer.

Sur la partie supérieure se dresse une petite coupole, une sorte de kiosque, garni de glaces, de 35 centimètres de diamètre, où se tient l’officier chargé de la direction. Au moyen de quelques leviers tenus à la main, il obtient la submersion du bateau, son inclinaison, les changements de vitesse, etc.

Le Gymnote est mu par des accumulateurs électriques, actionnant une machine dynamo-électrique. Le moteur électrique ne pèse pas plus de 2 000 kilogrammes, tout en donnant une vitesse de deux cents tours par minute. Ce moteur actionne l’hélice directement, c’est-à-dire sans transmission. Le bateau est éclairé, à l’intérieur, par des lampes électriques à incandescence.

Le Gymnote évolue comme un poisson, en direction ainsi qu’en profondeur, et on y respire à l’aise.

L’équipage comprend un officier, deux mécaniciens et un manœuvrier.

Pour sa sortie d’essai faite à Toulon, le Gymnote avait reçu cinq personnes : M. Zédé, le capitaine Krebs, M. Romazetti, M. Baudry de Lacantinerie, commandant du bateau et M. Picon, contre-maître, chef de construction.