Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 6.djvu/498

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le pétrole éloigné des régions d’huile par de petites conduites, à l’aide de pompes, mais au delà tout était supposition. Il y avait des tableaux théoriques montrant la résistance qu’il fallait vaincre pour faire passer des liquides dans des conduites pour de petites distances, et avec un calcul théorique simple, on pouvait se rendre compte approximativement du frottement pour de plus grandes distances, mais il n’y avait pas de tableaux établis d’après des résultats pratiques et il y avait là une nouvelle expérience à faire, celle de tenter de faire passer de l’huile dans des centaines de kilomètres de tuyaux dans un pays très accidenté, traversant deux chaînes de montagnes et un nombre incalculable de rivières et de criques.

« La science de l’ingénieur se trouvait là en face de nouvelles difficultés à surmonter et elles le furent avec plein succès. On avait réussi à amener l’huile de petites distances dans de petites conduites en faisant usage de pompes à un cylindre, appelées aussi petit cheval.

« La limite de leur puissance utile se fit bientôt sentir, par la rupture des conduites, par les défectuosités des joints de conduites, ainsi que par les nombreux accidents que causaient aux pompes les chocs constants à chaque changement de marche, sous la haute pression due à une résistance de frottement énorme.

« On installa fréquemment des pompes sur ces lignes locales, dont la plupart avaient de 20 à 25 kilomètres de long, et les conduites 0m,05 de diamètre, et où la résistance de frottement équivalait à une pression de 98 à 140 kilogrammes par centimètre carré. Les cylindres à vapeur de ces pompes avaient dans certain cas 0m,75 de diamètre ; elles actionnaient un plongeur de 10 à 12 centimètres ½ et la secousse, à chaque changement de coup de piston à ces pressions, ressemblait au bruit produit par un canon. Ces conditions étaient dès lors inadmissibles, aucun matériel et aucune conduite ne pouvaient résister à des efforts aussi violents.

« Le comité se décida à consulter M. Henry Worthington, de New-York, qui, de son vivant, passait pour le premier hydraulicien d’Amérique. Il fut chargé d’étudier la question, d’indiquer le système de pompe qui conviendrait le mieux pour ce travail. Le résultat fut la création et la construction d’une pompe du système de M. Worthington, qui fut montée près de Bradford, et reliée à une section de conduites de 0m,10 de diamètre, d’une longueur de 25 kilomètres, allant de Bradford à Carrolton, station située sur le chemin de fer de l’Érié. C’était une ligne nouvelle, mais constamment en réparation, pour les motifs énumérés précédemment.

« Le résultat du travail de cette pompe dépassa toutes les espérances, et amena une révolution complète dans le transport du pétrole. Son action, dans ces conditions difficiles, était d’une régularité parfaite ; le mouvement de la colonne d’huile dans la conduite, était uniforme et constant, tandis qu’avec l’ancien système de pompe à un cylindre, la colonne d’huile restait stationnaire après chaque coup de piston, avec une variation de pression de plusieurs centaines de kilogrammes. Avec la pompe Worthington on n’a aucun arrêt, l’écoulement est constant et la pression presque uniforme.

« De 1878 à 1881-1882, la construction des lignes de la Trunk C°, jusqu’au bord de la mer fut achevée, et à partir de ce moment, la raffinerie de l’huile sur les lieux mêmes, resta stationnaire ; puis, différentes raffineries ayant été détruites par le feu, l’opération cessa complètement, d’autant plus qu’au bord de la mer et des lacs, on construisait des raffineries considérables.

« La pompe d’épuisement, du type Worthington, est employée exclusivement par