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soleil est conducteur de l’électricité, et qu’il ne la conduit pas s’il est dans l’obscurité.

Bien des essais furent tentés pour mettre à profit cette singulière propriété du sélénium. Nous n’entrerons pas ici dans les détails relatifs à ces recherches, afin d’arriver tout de suite à la description de l’appareil de M. Graham Bell.

Pour, rendre sensibles les propriétés du sélénium, cet ingénieux physicien dispose comme il suit l’expérience.

Un crayon de sélénium EF (fig. 481) est placé dans le courant continu d’une pile voltaïque, P, et introduit, en même temps, dans le circuit d’un téléphone, NN, propre à transmettre les sons de la voix. On fait tomber sur le crayon de sélénium qui se trouve au foyer F d’un grand miroir concave, M, un faisceau lumineux, que l’on éclipse un grand nombre de fois en une seconde de temps, grâce au miroir concave tournant A qui est éclairé par le miroir plan B. Ce sont donc des émissions lumineuses successives et très rapprochées. Chacune de ces émissions occasionne une variation dans la résistance électrique du sélénium, placé au foyer du grand miroir concave, M, et par suite dans l’intensité du courant dont le circuit est le siège. Le téléphone placé dans ce circuit subit de cette manière des alternatives d’aimantations et de désaimantations correspondantes. Admettons qu’il se produise de la sorte 435 éclairs, il en résultera un nombre égal de variations dans le courant, et la plaque du téléphone récepteur exécutera 435 vibrations, c’est-à-dire donnera la note la du diapason normal.

Pour transmettre de même la voix humaine, M. Bell dispose deux petites lames voisines et parallèles, percées de fentes étroites, en regard l’une de l’autre, permettant à un faisceau lumineux de les traverser librement. L’une de ces lames est solidaire d’un support fixe, l’autre dépend d’une membrane téléphonique mince à laquelle elle est perpendiculaire. Lorsqu’on parle contre cette membrane, elle vibre et entraîne la lame dans tous ses mouvements. Alors les deux fentes cessent de se correspondre et le faisceau de lumière est éclipsé à certains instants en entier ou partiellement. Ce faisceau subit de la sorte, constamment, des variations dans son intensité, lesquelles correspondent exactement aux diverses amplitudes des vibrations de la membrane. C’est ce que M. Bell appelle un rayon de lumière ondulatoire.

L’appareil récepteur est disposé à l’autre station, séparée de la précédente par une distance quelconque. Cet appareil récepteur se composé du sélénium, de la pile et du téléphone articulant. Le rayon ondulatoire dirigé sur le sélénium, l’impressionne à chaque instant, en raison de son intensité. Il en résulte des variations ondulatoires dans la résistance du sélénium, et des vibrations correspondantes dans le téléphone. Ainsi, on entend avec ce téléphone les paroles prononcées vis-à-vis de la membrane de la première station.

La meilleure disposition consiste à faire réfléchir le faisceau lumineux sur un miroir plan et flexible, tel qu’une feuille de mica argenté ou de verre mince. On parle alors contre ce miroir, et ce sont ses propres vibrations qui modifient constamment la direction du rayon réfléchi.

Quant à la source de lumière, on s’est servi du soleil, dont les rayons concentrés sur le miroir à l’aide d’une lentille C (fig. 481) étaient rendus parallèles par une autre lentille aussitôt après leur réflexion. On s’est également servi d’un foyer électrique et même d’une lampe à gaz ou à pétrole.

Dans les expériences qui furent faites à Paris, à la fin du mois d’octobre 1880, dans les ateliers de M. Bréguet, les rayons du foyer électrique étaient reçues sur un réflecteur parabolique, qui les condensait tous en un même point : le foyer de ce miroir.