Page:Firmin - De l’égalité des races humaines.djvu/212

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gique des langues et les faits historiques qu’on est forcé d’y adapter. Mais ne faudrait-il pas aussi se demander si le système de Jacob Grimm ne mérite pas qu’on y ajoute certaines modifications ? On est bien porté à croire que la morphologie, tout en présentant une gradation réelle entre les langues, au point de vue de la composition phonétique, n’institue pas une supériorité absolue de telle forme à telle autre. Chacune des grandes divisions, — monosyllabiques, agglutinatives ou inflectives, — semble être capable d’une évolution qui lui est propre et au cours de laquelle elle peut acquérir une conformation très approchante de la perfection, c’est-à-dire de l’idéal qu’on se fait de la parole humaine. Ainsi se conçoit aisément un fait incontestable, c’est que le chinois, quoique inférieur à telle langue agglutinante ou agglomérante, si on se réfère à la théorie de Grimm, est arrivé dans le cercle de son évolution et en tant que langue artificielle, à produire des œuvres d’une supériorité incontestable.

« Le pouvoir qu’a l’esprit humain sur ses instruments, si imparfaits qu’ils soient, dit Whitney, est évidemment démontré par l’histoire de cette langue qui a répondu avec succès à tous les besoins d’un peuple cultivé, réfléchi et ingénieux, pendant une carrière d’une durée sans pareille ; elle a été employée à des usages bien plus élevés et plus variés que nombre de dialectes mieux organisés : ces dialectes étaient riches par leur flexibilité, leur développement ; mais ils étaient pauvres par la pauvreté même et la faiblesse de l’intelligence de ceux qui les maniaient[1]. »

Mais revenons à l’idée de F. Lenormant et de Guillaume de Humboldt, idée partagée d’ailleurs par nombre de savants. Est-il vrai que chaque race humaine est conformée

  1. Whitney, Le langage et l’étude du langage, 3e édit.