Page:Firmin - De l’égalité des races humaines.djvu/407

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fassent[1]. » Ainsi s’exprimait Jacquemont, un des voyageurs les plus intelligents. Vraiment, n’est-ce pas une dérision que de tant parler de la superexcellence de la race blanche aryenne, quand en réalité les blancs aryens valent si peu ? Les Anglais qui dominent sur l’Inde, peuvent-ils considérer bien haut ces Pandits plus bandits que tous les varatyas, encore qu’ils aient comme les Saxons la peau blanche et les cheveux blonds ? Pourquoi élève-t-on si haut sur les bords de la Seine et de la Tamise ce qu’on regarde si bas dans les parages du Gange ? Je serais bien tenté de croire que la science se prête servilement ici aux compromissions de la politique. Mais là n’est pas son rôle. Un tel soupçon suffirait pour l’avilir : aussi, pour l’honneur de la conscience humaine, admettons-nous plutôt que la plupart des savants se sont trompés, parce qu’ils n’ont considéré les choses que sous une seule face.

Dans l’un ou dans l’autre cas, on ne peut plus rationnellement attribuer à la race blanche le mérite exclusif de la civilisation indienne, avant d’avoir fait la preuve que toutes les grandes conceptions philosophiques ou poétiques de l’Inde proviennent d’individus dont le caractère d’hommes blancs est historiquement affirmé.

Kâlidâsa, Jayadêva et Valmiki étaient-ils blancs ou de la couleur de pain d’épices, ou même noirs ? Personne n’a jamais dit de quelle nuance ils étaient. On se contente d’admirer le Meghadûta dont la touche fine et délicate enchante l’esprit ou de goûter la fraîcheur de sentiment qu’il y a dans Sakountala ; on aime à suivre les aventures amoureuses de Krushna dans le mystique Gita-Govindo, le Cantique des cantiques de la littérature indienne ; on sent que le Râmâyana, épopée magnifique où les légendes religieuses et philosophiques de l’Inde tiennent lieu d’une

  1. Corresp. de V. Jacquemont. Paris, 1834 (lettre du 22 avril 1831)·